Monique Proulx : Les grands mots
MONIQUE PROULX est la présidente d’honneur du 6e Festival de la littérature mondiale. Elle qui adore la littérature et les écrivains a de bien bonnes raisons de nous faire partager sa passion.
Avant de se terrer dans la petite maison de Gabrielle Roy, dans Charlevoix, où elle ira écrire son prochain roman, Monique Proulx a décidé de monter au front. «Je donne un livre tous les cinq ans, me confie-t-elle en sirotant son café dans un petit resto de l’avenue Laurier. Je trouvais important de donner aussi du temps et de l’énergie à la défense de cette littérature que j’aime tant.»
Nommée présidente d’honneur, tout comme Sergio Kokis, de ce sixième Festival de la littérature mondiale, Monique Proulx fait l’éloge de l’événement, qu’elle trouve nécessaire à la vie culturelle. «Les écrivains ne sont pas du tout estimés à leur juste valeur, et cela se voit sur plusieurs plans, explique-t-elle. On les considère souvent comme une bizarrerie, un luxe que la société s’offre mais dont elle pourrait se passer. On constate cela lorsqu’on voyage un peu: dans bien des pays, les écrivains ont un statut, une crédibilité, un respect plus forts qu’ici. De façon générale, nous avons un gros problème au Québec avec tout ce qui a trait aux choses de l’esprit… c’est toujours suspect de réfléchir, d’acquérir de la lucidité. Pourtant, c’est l’esprit qui invente son malheur! Il peut aussi fabriquer du bonheur, du plaisir. Je ne comprends pas cette peur.»
Donner sa parole
Cette année, le Festival met beaucoup l’accent sur la poésie. «C’est souvent ce qui passe le mieux à l’oral, dit la présidente d’honneur. Et pour ce Festival excentré (puisqu’il y a des activités ailleurs, à Québec, par exemple), festif, qui a lieu dehors, dans les endroits publics où il y a beaucoup de circulation, dans les parcs, la poésie devient le vecteur par excellence pour faire passer la parole.»
Ce sera particulièrement vrai pour ces spectacles qui lui tiennent à coeur: Anne Hébert: À la source du monde, qui réunit des textes que lira la comédienne Patricia Nolin («Tout le monde déplore la mort d’Anne Hébert, mais qui connaît véritablement son oeuvre, sa poésie?») et L’Archipel des mots, que Monque Proulx animera avec Kokis, dans une mise en scène de D. Kimm. «J’ai été très impressionnée par la poésie et la prestance de cet écrivain gigantesque mais peu connu qu’est Adonis. Cet écrivain est le père de la modernité de la poésie arabe, puisqu’il a fusionné plusieurs courants.» Parmi les autres auteurs invités à cette soirée, signalons le Camerounais Mongo Beti, la Cubaine Zoé Valdès, ainsi que les Québécois Hélène Monette, Tony Tremblay et Hélène Dorion.
«Je veux que les gens voient que les écrivains sont des humains, déclare Monique Proulx. Et que leur parole est vivante. Je trouve toujours cela émouvant d’entendre des écrivains lire des extraits de leurs oeuvres… Même s’ils ne sont pas toujours de grands acteurs, ils ont ce quelque chose de vivant, cette émotion. Et, moment suprême, enfin des mots qui ne sont pas assujettis à la "productivité"!»
En fait, Monique Proulx veut qu’on célèbre la puissance de l’invention, du rêve, le pouvoir des mots, et la liberté. «C’est ce que nous avons de plus important, et c’est aussi pour cela que je suis contente d’être jumelée à Sergio Kokis pour ce Festival: c’est un homme qui a su s’imposer sans faire de courbettes, et sans concessions. Lui et Dany Laferrière, ces dernières années, nous ont donné une formidable leçon d’indépendance.» Profitons-en.
L’Archipel des mots aura lieu le jeudi 18 mai
au Cabaret Music-Hall (2111, boulevard Saint-Laurent)
Entrée libre
Anne Hébert: À la source du monde aura lieu du vendredi 12
au dimanche 14 mai
au Lion d’or (1676, rue Ontario Est)
Le 6e Festival de la littérature mondiale
Du 12 au 20 mai
Info-festival: 828-3061