Edith Wharton : Les New-Yorkaises
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Edith Wharton : Les New-Yorkaises

Edith Wharton avait tout de la chroniqueuse mondaine, cette Américaine née en 1862, qui vivait dans un milieu très bourgeois, à New York, et dont la vie intense et riche est relatée dans une biographie toute récente signée Diane de  Margerie.

Edith Wharton

avait tout de la chroniqueuse mondaine, cette Américaine née en 1862, qui vivait dans un milieu très bourgeois, à New York, et dont la vie intense et riche est relatée dans une biographie toute récente (publiée chez Flammarion) signée Diane de Margerie (auteure d’essais sur Marcel Proust, sur Gustave Moreau, et spécialiste de l’oeuvre de Wharton).

Mais Wharton devint une grande écrivaine, et fut l’auteure de près d’une cinquantaine d’ouvrages (romans, essais, récits, nouvelles, guide déco, etc.), et trace dans Les New-Yorkaises (Twilight Sleep, originellement publié en 1927) le portrait d’une classe sociale maladivement accrochée aux apparences.

Pauline Manford est une femme du monde, divorcée, remariée, et mère de Nona et Jim, enfants de pères différents. Elle maintient en équilibre une maisonnée active, pleine de petits drames familiaux, drames qui, bien sûr, pourraient faire mal paraître la famille Manford aux yeux d’une société qui ne demande qu’à déblatérer sur son prochain.

Elle ne comprend pas vraiment Nona, qui vit selon ses propres envies, sans trop se soucier des qu’en dira-t-on, mais en fait sa gande confidente. Pauline est également éprise de spiritualité, invite et finance ses gourous, et se consacre chaque jour à sa méditaiton quotidienne, et à la gymnastique rythmique, afin de garder le contrôle sur sa vie, sur celle des autres, et de propager de bonnes vibrations de la chambre au salon, et, pourquoi pas, dehors. Elle recommande même à ses proches ces nouvelles philosophies, très en vogue dans les capitales occidentales, qui, au dix-neuvième siècle, ont découvert l’orientalisme. «Le Mahatma était un des meneurs de ce nouveau mouvement qu’il appelait Retour à la pureté. Il ne cessait de célébrer la noblese du corps humain, et de faire l’éloge de la grâce des vêtements orientaux flottants, en comparaison de la raideur des tenues occidentales.»

Vaste sujet de conversation, aussi, dans ces dîners mondains, dont Pauline a lesecret. «C’était en de telles occasions qu’elle récoltait sa récompense. Personne à New York n’avait un cuisinier aussi doué, ni un service aussi discrètement efficace, ni un éclairage à la fois aussi brillant et aussi doux, ni une pareille habileté pour regrouper des personnes en vue, non seulement riches ou à la mode, mais en plus susceptibles d’éprouver du plaisir à se trouver ensemble.» Même à la campagne, en pleine nature, elle calcule tout à la fourchette près, pour inviter les prestigieux couples du coin, à qui il faut montrer qu’on sait recevoir, même au milieu des foins, qu’on sait décorer une maison, cultiver un jardin, etc.

Satire sociale sur les moeurs de son époque, le roman de Wharton est tissé de cinglantes remarques à l’égard d’individus obnubilés par leur image. Parfois ridicules, parfois touchants, les hommes et les femmes qui peuplent cet univers sont toutefois attachants par leurs travers et leurs grands sentiments qui ressemblent tant aux nôtres, un siècle plus tard!. Les New-Yorkaises est signé par l’auteure du Temps de l’innocence, roman qui fut porté à l’écran par Martin Scorsese, et qui valut, en 1921, le prix Pulitzer à Edith Wharton, première femme à recevoir une telle récompense.

Éd. Flammarion, 2000, 293 p.