Hunter S. Thompson : Rhum Express
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Hunter S. Thompson : Rhum Express

Figure controversée de la littérature américaine, Hunter S. Thompson nous a donné Hell’s Angels, Las Vegas Parano et une série de récits-reportages hallucinés. Ses lecteurs seront heureux d’apprendre que son tout premier roman, réputé perdu, se trouve désormais en librairie. Rhum Express, commencé en 1959, aurait dormi longtemps au fond d’un tiroir, avant qu’un éditeur américain ne le publie enfin, en 1998. Robert Laffont nous en présente aujourd’hui une version française.

Figure controversée de la littérature américaine, Hunter S. Thompson nous a donné Hell’s Angels, Las Vegas Parano et une série de récits-reportages hallucinés. Ses lecteurs seront heureux d’apprendre que son tout premier roman, réputé perdu, se trouve désormais en librairie. Rhum Express, commencé en 1959, aurait dormi longtemps au fond d’un tiroir, avant qu’un éditeur américain ne le publie enfin, en 1998. Robert Laffont nous en présente aujourd’hui une version française.

Kemp, le personnage principal et alter ego de l’auteur, est un jeune Américain désabusé ayant tourné le dos à la vie sédentaire et vagabondé de par le monde. À trente ans, il décroche un boulot de journaliste au San Juan Daily News, un quotidien portoricain. Il découvre alors le San Juan des années cinquante, métamorphosé par l’influence américaine, morceau de paradis devenu un repaire de canailles et de magouilleurs.

Le narrateur nous fait le compte rendu de ses amitiés louches, de ses amours volages, de ses cuites quotidiennes et de ses prises de bec avec la police locale – qui semble méconnaître la notion d’éthique. Rhum Express est aussi le monologue intérieur d’un homme qui se méfie des apparences et cherche encore à quoi rime sa vie. Ça donne un genre de parcours initiatique à l’envers, qui conduit à plus d’incertitude que de certitude; un roman très réaliste dont cette longue phrase pourrait résumer et l’histoire et le ton: «Je me retrouvais là, installé dans un hôtel de luxe, fonçant à travers une ville à moitié hispanique dans un cabriolet qui ressemblait à un cafard et faisait le bruit d’un avion de chasse, maraudant dans les ruelles ou jouant les voyeurs sur les plages, traquant mon déjeuner dans une mer infestée de requins, pourchassé par des foules qui me hurlaient dessus dans une langue étrangère, et cela dans une île au passé colonial rococo où tout se négociait en dollars américains, où tout le monde conduisait des voitures made in USA et passait des heures à la roulette en se donnant l’illusion d’ête à Casablanca.»

Texte à part dans l’oeuvre de Thompson, qui allait bientôt inventer le style gonzo et devenir célèbre avec ses récits de vie complètement délurés, Rhum Express a un charme particulier. Ici, le style est moins déjanté, mais on perçoit déjà cette manière à la fois désinvolte et maîtrisée de développer le récit, de même que le regard aiguisé sur le monde et ses contradictions.

Séduisant, même si la traduction très franchouillarde – signée Bernard Cohen – de l’argot américain agace par moments.

Éd. Robert Laffont, 2000, 270 p.

Rhum Express
Rhum Express
Hunter S. Thompson