d'Emmanuel Guibert : La Guerre d'Alan (volume 1)
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d’Emmanuel Guibert : La Guerre d’Alan (volume 1)

Le Français Emmanuel Guibert avait trente ans lorsqu’il rencontra l’Américain Alan Ingram Cope qui, lui, en avait soixante-neuf. Durant leur amitié, qui devait prendre fin cinq ans plus tard, à la mort de ce dernier, le vieil homme racontait sa vie, un magnétophone dans les mains, et le jeune l’écoutait, intéressé notamment par l’épisode de la Seconde Guerre mondiale. De ces souvenirs, conservés sur de nombreuses cassettes, Guibert a réalisé un livre, une bande dessinée, bouleversant de sensibilité et de vérité.

Le Français Emmanuel Guibert avait trente ans lorsqu’il rencontra l’Américain Alan Ingram Cope qui, lui, en avait soixante-neuf. Durant leur amitié, qui devait prendre fin cinq ans plus tard, à la mort de ce dernier, le vieil homme racontait sa vie, un magnétophone dans les mains, et le jeune l’écoutait, intéressé notamment par l’épisode de la Seconde Guerre mondiale. De ces souvenirs, conservés sur de nombreuses cassettes, Guibert a réalisé un livre, une bande dessinée, bouleversant de sensibilité et de vérité.

Le premier tome de La Guerre d’Alan raconte essentiellement l’entraînement militaire du jeune Californien dans une base du Kentucky, entre 1943 et 1945, et se termine par la traversée de l’Atlantique et le débarquement de Normandie qui a lieu le jour de son vingtième anniversaire (Guibert promet une suite où il relatera la participation à la guerre et l’occupation en Allemagne de Cope). Il décrit l’entraînement physique et la préparation psychologique que recevaient les soldats nouvellement enrôlés de l’armée américaine, les amitiés d’Alan, ses aventures à la tête du char d’assaut qu’il a appris à conduire, ses études pour devenir opérateur radio.

Le scénario inspiré du récit de Cope garde la simplicité de l’oralité. Accompagnée de dialogues, la narration à la première personne s’attache parfois à des anecdotes, à des détails peu spectaculaires mais qui sont de ceux qui peuvent marquer une vie: une certaine conversation, une découverte, un accident, la rencontre brève d’une personne qu’on ne reverra plus. Le héros de Guibert est un optimiste et le récit ne sombre jamais dans le mélodramatique, restant descriptif, sur le mode de la réflexion. Ce qui n’empêche pas de percevoir la sensibilité du personnage lors de certains épisodes: la visite à sa grand-mère mourante durant une permission, la séparation d’avec son meilleur ami qui se retrouve dans un autre bataillon, sa joie lorsqu’il apprend, plusieurs années plus tard, que cet am n’est pas mort.

La sobriété du discours rejoint celle du dessin, en noir et blanc avec des tons de gris, souvent dépourvu d’arrière-plan, à la ligne claire, d’une précision et d’une élégance qui sont aussi celles de sa calligraphie qui, à elle seule, est un des plaisirs que procure ce livre. Emmanuel Guibert nous avait habitués à ses magnifiques bandes peintes dans La Fille du professeur (en collaboration avec Joann Sfar au scénario) ainsi que dans Le Capitaine écarlate (avec David B.). Mais c’est dans cette Guerre d’Alan, une oeuvre solo, mature, qu’il se montre l’artiste le plus accompli, incontestablement.

L’Association, coll. «Ciboulette», 2000, 86 p.