Martin Luther King : Minuit, quelqu’un frappe à la porte

Minuit, quelqu’un frappe à la porte
Les grands sermons de Martin Luther King
de Martin Luther King
Dans la tradition catholique, il ne faut pas s’en cacher, le sermon est en général le pire moment de la messe; dans la tradition protestante, il occupe la totalité du service, et la chose serait bien pénible si les pasteurs ne faisaient pas montre d’une grande éloquence.
Je ne suis pas religieux; je ne suis pas croyant. Et pourtant il m’est difficile de lire les grands sermons de Martin Luther King rassemblés sous le titre de Minuit, quelqu’un frappe à la porte sans frémir d’émotion. Parce qu’au-delà de toutes les références bibliques qu’ils peuvent contenir, les propos de Martin Luther King sont avant toute chose un hymne à la dignité humaine. Parce que les paroles du révérend King en appellent à ce que l’humanité a de meilleur. Parce qu’un certain nombre de ces sermons, reconstitués à partir d’enregistrements, sont ponctués d’exclamations des membres de l’assemblée témoignant d’une réelle communion entre le pasteur et son auditoire.
Aussi parce que Serge Molla, le traducteur de l’ouvrage, réussit par moments à donner à la langue française le rythme et les couleurs qui caractérisent la touchante éloquence du docteur King, comme à l’occasion de ce sermon dans lequel le pasteur revient sur son célèbre discours "I have a dream": "Il y a deux ans environ, je me tenais avec plusieurs d’entre vous ici présents – et vous tous, spirituellement -, à Washington devant le mémorial de Lincoln. (Oui) À la fin de mon discours, j’essayai d’évoquer devant la nation un rêve personnel. Je dois vous confesser ce matin que, depuis cet après-midi étouffant d’août 1963, mon rêve a souvent tourné au cauchemar. (Seigneur) Je l’ai vu brisé. Brisé une nuit sur l’autoroute 80 en Alabama lorsque que Mme Viola Luizzo fut abattue. […] J’ai vu mon rêve brisé en parcourant les rues de Chicago (Dis-le clairement) en voyant de jeunes Noirs, hommes et femmes, désespérés par le chômage, au point de considérer la vie comme un long corridor sans panneau indiquant la sortie. Et cela ne concerne pas que des Noirs. J’ai vu mon rêve brisé en allant dans les Appalaches, en voyant mes frères blancs vivre dans la pauvreté aux côtés des Noirs."
Minuit, quelqu’un frappe à la porte est un ouvrage dont la lecture donne envie de lutter contre les bassesses de l’humanité: c’est dire que c’est un livre rare, et précieux. Éd. Bayard, 2000, 234 p.