John Updike : Aux confins du temps
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John Updike : Aux confins du temps

Les romans de John Updike sont tous imprégnés de la même saveur: celle d’un dimanche d’automne de la Nouvelle-Angleterre, aux abords de la campagne, à la limite des banlieues de Boston.

Les romans de John Updike sont tous imprégnés de la même saveur: celle d’un dimanche d’automne de la Nouvelle-Angleterre, aux abords de la campagne, à la limite des banlieues de Boston. Et ses livres racontent toujours plus ou moins la même histoire: des hommes et des femmes d’âge mûr cherchent à rompre avec le ronron de leur existence un peu trop rangée en cherchant à renouer avec leur jeunesse à coups de parties de fesses. C’est tristounet et tendre, relevé d’une touche de cynisme.

Aux confins du temps n’est sans doute pas le meilleur ouvrage d’Updike: l’auteur y est simplement à la hauteur de lui-même.

On est en 2020, au lendemain d’une guerre qui a eu pour conséquence que l’appareil politique fédéral des États-Unis est désormais en ruine. Sans gouvernement central, les régions du pays sont plus ou moins isolées les unes des autres. Quelques grandes corporations ont pris en main les services publics auparavant assumés par Washington: parabole sur la privatisation… Des gangs de rue assurent l’ordre dans les villes: parabole sur la culture de la violence… À la campagne, des petites mafias locales font office de services d’assurances: parabole encore…

Burn Turnbull a 70 ans; le roman raconte ce qui pourrait bien être la dernière année de sa vie. Le bonhomme y fait état de ses rencontres plus ou moins fantasmées avec une jeune maîtresse, de ses parties de golf (retraite oblige), et de la passion de sa femme pour l’horticulture. Il se passe finalement peu de chose dans sa vie, malgré les bouleversements qui ébranlent la nation: les petits événements de notre vie privée nous importent toujours davantage que les grands drames de l’histoire. Mais la maladie, l’approche de la mort, le passage des saisons et le destin des chevreuils (les traducteurs français, Claude et Jean Demanuelli, parlent évidemment de… daims) qui traversent le terrain de Turnbull en broutant les chères fleurs de son épouse le conduisent par moments à réfléchir sur ce qui relie le destin de chaque homme à celui de l’univers.

On aura deviné que ce roman est un brin ennuyeux, tout comme l’est la vie de la plupart d’entre nous. C’est le thème récurrent de l’oeuvre d’Updike: la classe moyenne est condamnée à la banalité. Aux confins du temps précise que la chose demeure vraie même quand l’actualité a des allures d’apocalypse. Ceux et celles qui aiment se laisser bercer par la triste et monotone mélodie des livres de John Updike seront ravis. S’ils sont capables de passer outre au travail de traducteurs tellement au fait des réalités nord-américaines que, pour eux, le Boxing Day est "le 26 décembre, jour où l’on ouvre les cadeaux"…

Aux confins du temps
de John Updike
Éd. du Seuil, 2000, 363 p.