La Marche du fou : Jean Lemieux
En 1991, un nouveau venu dont on savait très peu de chose, sinon qu’il était médecin et qu’il travaillait aux Îles-de-la-Madeleine, faisait paraître La Lune rouge (Québec/Amérique), un premier roman prometteur, une intrigante histoire de meurtres qui empruntait la forme du polar pour mieux dépeindre cette communauté que Lemieux connaissait de l’intérieur.
En 1991, un nouveau venu dont on savait très peu de chose, sinon qu’il était médecin et qu’il travaillait aux Îles-de-la-Madeleine, faisait paraître La Lune rouge (Québec/Amérique), un premier roman prometteur, une intrigante histoire de meurtres qui empruntait la forme du polar pour mieux dépeindre cette communauté que Lemieux connaissait de l’intérieur.
Il aura fallu attendre 10 années, au cours desquelles Jean Lemieux est revenu vivre au Québec, puis s’est mis (avec assez de bonheur) à la littérature pour adolescents (La Cousine des États, Québec/Amérique, 1993; Le Trésor de Brion, Québec/Amérique, 1995), avant de lire un deuxième roman "adulte". Une attente, hélas, qui n’aura pas été récompensée. La Marche du fou raconte le périple de Jacques Robitaille, un jeune diplômé en histoire qui, après avoir mis le point final à son mémoire de maîtrise, décide, sur un coup de tête, de se défaire de tous ses biens et de partir pour un voyage vers l’inconnu. Ni son père, un austère médecin, ni son directeur de thèse, un Haïtien amateur d’échecs, ni son copain d’enfance
devenu spéculateur boursier, ni ses amantes (il n’est pas un gars fidèle, il a toujours deux blondes) n’arrivent à le retenir. Robitaille vend sa voiture, ses actions, ses meubles, et s’achète un billet d’avion pour Bangkok. De là, il se retrouve à Ko P, au Paradise Bungalow, un repaire d’ex-hippies assez louche où il fera la rencontre d’une Canadienne anglaise
dont il tombe amoureux fou. Mais la belle est mystérieuse, mythomane, fuyante. Quand elle disparaît sans laisser d’explications, il décide de la poursuivre à travers le continent, la retrace par des moyens hautement improbables dont elle ne s’étonne même pas, et finit par percer son mystère. Québec, Bangkok, Rome, Athènes, on se promène beaucoup dans ce roman qui finit par ressembler à un album de cartes postales. Mais on ne va nulle
part. L’histoire avance à tâtons, sans rythme, sans tension. Dès que l’intrigue semble vouloir se resserrer, l’auteur nous amène ailleurs. Qu’un personnage intéressant se présente, le voilà aussitôt relégué aux oubliettes. Qu’un certain suspense se profile, voilà qu’il tombe à plat. On ressort de cette lecture avec l’impression d’un roman informe, inachevé, incomplet. Un roman qui, entre le récit de voyage, l’histoire d’amour, le
roman d’apprentissage et la sempiternelle métaphore sur les deux solitudes, se cherche sans arriver à se trouver.
Éd. La courte échelle, coll. 16/96, 2001, 183 p.