Jean-Marc Saint-Denis et Olivier Morissette : Le Jour à Wentworth
ean-Marc Saint-Denis et Olivier Morissette ont mis dix ans à coréaliser Le Jour à Wentworth, intéressante bande dessinée adaptée d’une nouvelle de H. P. Lovecraft, maître américain de la littérature de l’étrange du début du siècle.
d’après H. P. Lovecraft
Un soir de tempête, dans un coin reculé du Maine, un commis voyageur cherche un abri pour lui et pour sa vieille Ford, sur le point de s’embourber dans les ornières inondées du chemin. Alors que tout espoir semble perdu, il aperçoit une faible lueur provenant d’une maison isolée et, sans reculer devant l’atmosphère lugubre des lieux, il frappe à la porte que lui ouvre Amos Stark, vieillard solitaire, décrépit, et sur la conscience de qui pèse un terrible secret. Invité à s’y reposer, le héros ignore qu’il s’apprête à passer dans cette demeure rien de moins qu’une nuit d’horreur.
Jean-Marc Saint-Denis et Olivier Morissette ont mis dix ans à coréaliser Le Jour à Wentworth, intéressante bande dessinée adaptée d’une nouvelle de H. P. Lovecraft, maître américain de la littérature de l’étrange du début du siècle. Musiciens et dessinateurs, les deux auteurs montréalais sont connus pour deux autres albums qu’ils ont créés en duo: Goreshriek (1992) et James Dean – Mangez amis plumés (paru en 1986, alors qu’ils fréquentaient tous les deux l’école secondaire Jeanne-Mance!).
Le Jour à Wentworth s’ouvre sur le récit de la tempête qui mènera au dénouement horrible et qui occupe les 26 planches dessinées par Saint-Denis. Dignes des illustrations des gothic novels anglais, celles-ci contiennent une narration typique du genre, délicieusement bavarde, avec force hyperboles et superlatifs. Parlant de la triste vallée qu’il traverse, le narrateur explique par exemple: "Les nuées ténébreuses des corbeaux ne font que la traverser et ils ne s’abattent que pour dépecer rapidement quelque charogne et s’en repaître." Au centre de ce récit, 13 planches muettes signées Morissette représentent le Septième Livre de Moïse, "sorte de bible des sorciers" prêtée par le vieillard à son hôte qui s’en servira comme livre de chevet. Le trait stylisé, détaillé et délirant de cette partie crée un contraste saisissant et empêche l’oeuvre de se cantonner dans un seul genre.
Le livre paraît chez Soulières qui nous avait donné l’an dernier l’adaptation d’une autre oeuvre littéraire, celle de La Mercière assassinée d’Anne Hébert réalisée par Mira Falardeau. Dans notre production locale peu abondante de bandes dessinées, il faut saluer le travail audacieux de cet éditeur spécialisé dans la littérature jeunesse, mais qui croit en la BD pour adultes et qui nous en propose ici et là de beaux spécimens. En noir et blanc, comme il se doit.
Éd. Soulières, coll. "Mille bulles", 2001, 50 p.