sous la direction de Stéphane Batigne : Québec, espace et sentiment

Autrement

est une revue française qui a l’habitude de proposer des publications intelligentes. Le numéro qu’elle fait paraître sous le thème de Québec, espace et sentiment est à la hauteur de sa réputation.

Publié sous la direction de Stéphane Batigne, un journaliste français qui a fait de Montréal sa ville d’adoption, Québec, espace et sentiment trace un portrait fort représentatif de nos réalités socioculturelles. Ce qui s’explique en partie par le fait que les articles regroupés dans cette publication ont été rédigés soit par des chroniqueurs québécois, soit par des Français résidant depuis un bout de temps par chez nous: les auteurs savent de quoi ils parlent!

À la lecture de Québec, espace et sentiment, les Français découvriront que ce coin de pays est bien autre chose que la "cabane au Canada" que continuent de leur vendre les brochures touristiques. Et les Québécois y trouveront par moments de quoi alimenter leur propre réflexion sur leur identité. Le texte d’Alain Gerbier, par exemple, avance un ensemble de remarques pertinentes sur ce qu’on pourrait appeler notre totalitarisme de la familiarité. Et dans un article retraçant l’histoire de notre devise nationale ("Je me souviens"), Antoine Robitaille interroge d’une façon éclairante notre relation à l’Amérique et à l’Europe.

S’il est un problème avec Québec, espace et sentiment, ce n’est pas avec l’ouvrage lui-même: c’est avec le tralala médiatique que suscite sa parution (et auquel participe en fin de compte le présent compte rendu…). Chaque fois qu’un éditeur français publie quelque chose qui nous concerne, tout ce que le pays compte de chroniqueurs culturels s’empresse de faire écho à l’événement. Eh! la mère patrie daigne s’intéresser à nous! Comme si l’on existait uniquement dans la mesure où les Français parlent de nous!

Québec, espace et sentiment est un ouvrage dont la teneur démontre que les Français ont plus ou moins perdu leur arrogance de colonisateurs qui a longtemps empreint le regard paternaliste qu’ils portaient sur leurs "cousins du Canada". L’intérêt quelque peu excessif que le Québec porte à la publication de ce numéro d’Autrement montre que nous ne nous sommes pas encore tout à fait débarrassés de notre mentalité de colonisés…

Éd. Autrement, Collection Monde, hors-série no 124, février 2001, 227 p.