Jouer avec le feu, Armand Vaillancourt: Sculpteur engagé : John K. Grande

Mettez n’importe quelle sculpture d’Armand Vaillancourt au coeur d’une forêt: vous aurez l’impression que c’est la nature elle-même qui l’a placée là. L’oeuvre de Vaillancourt est tellurique: elle semble jaillir des entrailles mêmes de la Terre. Sur le plan géologique, 100 ans suffisent à peine à produire quelques grammes de poussière; à 71 ans, Vaillancourt a déjà créé un vaste ensemble d’objets exprimant ce que la force des vents et de l’eau, ce que les mouvements de la croûte terrestre prennent des siècles, voire des millénaires à faire apparaître. La sauvegarde de ses sculptures, souvent monumentales, relève tout autant du respect de la liberté d’expression que de la protection de l’environnement.

Armand Vaillancourt est un des plus grands artistes du XXe siècle. Il était plus que temps de lui consacrer une première biographie. Dans Jouer avec le feu, Armand Vaillancourt: Sculpteur engagé, John K. Grande retrace les principaux événements ayant ponctué l’existence du bonhomme, et reconstitue le contexte de la création de ses principales oeuvres.

Vaillancourt est le contemporain de Jack Kerouac et de la beat generation; il est à la sculpture ce que Jackson Pollock est à la peinture, ce que le free jazz et John Coltrane sont à la musique: quelque chose de radicalement neuf surgissant dans le paysage culturel de l’après-guerre. Et le livre de Grande nous fait réaliser que dans le Montréal des années 50 et 60, on savait déjà lutter contre la bêtise des censeurs et des bien-pensants.

Jouer avec le feu célèbre ce qu’on peut proprement appeler l’oeuvre d’une vie. Car, sculptural, Vaillancourt l’est lui-même: sa carrure et sa carrière ne font qu’un. Mais surtout parce que sa vie comme ses oeuvres sont habitées par la même force: la liberté.

Éd. Lanctôt, 2001, 128 p.