Le Parfum disparu : Pierre Christin et Annie Goetzinger
La carrière prolifique de Pierre Christin a pris son envol avec le premier album mettant en scène les aventures de Valérian, héros d’une série éponyme créée en 1967 avec l’illustrateur Jean-Claude Mézières, considérée aujourd’hui comme l’une des plus imaginatives bandes dessinées de science-fiction françaises.
La carrière prolifique de Pierre Christin a pris son envol avec le premier album mettant en scène les aventures de Valérian, héros d’une série éponyme créée en 1967 avec l’illustrateur Jean-Claude Mézières, considérée aujourd’hui comme l’une des plus imaginatives bandes dessinées de science-fiction françaises. Parallèlement à cette oeuvre, Christin a écrit des scénarios pour plusieurs dessinateurs de renom, dont Jacques Tardi, mais aussi Enki Bilal, avec qui il a, entre autres, signé Partie de chasse (en 1983), génial règlement de comptes entre membres de la nomenklatura soviétique.
Tant dans le domaine de la science-fiction que dans celui de l’histoire contemporaine, Christin fait partie des premiers auteurs à avoir abordé des thèmes dits sérieux (politiques, sociaux ou philosophiques) dans des bandes dessinées essentiellement destinées aux adultes.
Dans la nouvelle série qu’il scénarise, Agence Hardy, Christin revient à une ville et à une période chères à son coeur: le Paris des années 50. Jolie veuve sans ressources, dont le passé n’est que discrètement esquissé, Madame Hardy a ouvert une agence de détectives. Son premier client sérieux, propriétaire d’une usine de produits pharmaceutiques, l’engage pour rechercher un de ses chimistes, disparu au moment où il allait déposer un important brevet. Avec son jeune associé Vittorio, fils d’immigrant italien, elle mènera l’enquête et risquera sa vie en jouant dans les plates-bandes d’un puissant réseau d’espionnage industriel. Des personnages secondaires complètent le tableau: une vieille baronne communiste qui lit L’Humanité en buvant du champagne, un séduisant agent du gouvernement américain protégeant de loin l’héroïne, quelques voisins contribuant à la représentation d’une typique vie de quartier française.
Illustré par Annie Goetzinger, une des rares dessinatrices réalistes de BD, Agence Hardy se distingue par un graphisme pur, simple et sensuel. Malgré quelques maladresses (les mains des personnages, par exemple, lorsqu’il s’agit de tenir un stylo, un journal ou un porte-cigarettes), Goetzinger crée une atmosphère délicieusement rétro qui rappelle à la fois les photographies de Robert Doisneau et les films de Jacques Becker. Ainsi, et malgré certaines invraisemblances du scénario (on peut douter qu’un industriel français du milieu du siècle songe à s’adresser à une femme pour mener une telle enquête), on se laisse emporter par cette oeuvre, hommage rendu à une époque, et qui doit se poursuivre dans deux autres tomes.
Éd. Dargaud, 2001, 48 p.