Livres jeunesse sur la guerre : Soldats de plomb
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Livres jeunesse sur la guerre : Soldats de plomb

On nous a dit de ne pas traumatiser les jeunes outre mesure, de les préserver de l’orgie d’images montrant inlassablement la tour éventrée, avec ces ovnis qui s’avéraient être des humains plongeant vers leur délivrance, et puis l’effondrement successif des gratte-ciel.

On nous a dit de ne pas traumatiser les jeunes outre mesure, de les préserver de l’orgie d’images montrant inlassablement la tour éventrée, avec ces ovnis qui s’avéraient être des humains plongeant vers leur délivrance, et puis l’effondrement successif des gratte-ciel. Quelques mois après l’attaque, ils ont d’ailleurs presque tout oublié. New York? C’est tout droit par en bas. L’Afghanistan? C’est la terre d’accueil de Ben d’la dinde, comme ils l’ont naturellement rebaptisé en riant.

L’idée n’est pas, évidemment, de les empêcher de rire, ni de les rendre fous de peur, mais peut-être peut-on, avec eux, arrêter de faire comme si la guerre n’avait pas lieu. Voici deux suggestions de romans qui, sans être le moindrement terrorisants, ont tout le réalisme qui préservera l’étincelle de conscience chez les jeunes lecteurs.

Signé par la romancière Hélène Vachon (connue des petits de 7 ans et plus pour sa série Somerset), L’Oiseau de passage use d’un mélange extrêmement bien dosé d’humour et de gravité pour sensibiliser les jeunes de 10 ans et plus aux conséquences de la guerre, mais aussi de la pauvreté. S’ouvrant sur l’image d’un oiseau qui fonce dans la fenêtre d’une salle de classe et s’écrase au sol après avoir blessé un élève, le roman nous fait peu à peu découvrir l’univers d’un petit garçon âgé d’environ 11 ans, si faible et mal nourri qu’il s’est évanoui après avoir été heurté par l’oiseau. Il faudra cet événement pour que la titulaire de la classe, une Polonaise rescapée de la Seconde Guerre, réapprenne à percevoir la douleur d’autrui, et la sienne, et à miser de nouveau sur la vie.

La jeunesse est chanceuse de pouvoir compter sur les connaissances de Maryse Rouy pour faire une intrusion dans le fascinant monde médiéval. Passionnée par tout ce qui concerne le Moyen-Âge, l’auteure de Mary l’Irlandaise (2001) a commencé sa carrière littéraire en signant Azalaïs ou La Vie courtoise (1995), suivi de Guilhèm ou Les Enfances d’un chevalier (1997), qui nous permettaient tous deux de comprendre le fonctionnement d’un royaume et les us en fait d’amour courtois comme de chevalerie. Jordan et la forteresse assiégée est la troisième histoire à propos du jeune Jordan que donne madame Rouy aux lecteurs de 12 ans et plus (après Jordan apprenti chevalier et La Revanche de Jordan). Dans celui-ci, Jordan quitte le château familial à 12 ans, comme le veut la coutume, pour terminer sa formation de chevalier chez le suzerain. Nouveau venu parmi l’entourage du maître, Jordan ne sera pas de ceux qui, lors du siège du château, combattent l’ennemi grimpés sur leur monture, mais il n’en sera pas moins confronté aux aléas de la guerre. Et si, privilège du héros, il s’en sort indemne, il aura connu son lot de peur, de faim, de trahison et d’humiliation.

Enfin, il n’est pas inutile de rappeler que les lecteurs de 9 ans et plus qui ne dédaignent pas les essais trouveront ample matière à réflexion dans la petite plaquette Dire non à la violence, parue chez Milan junior il y a quelques mois dans l’excellente collection "Les essentiels".

L’Oiseau de passage, d’Hélène Vachon, Dominique et Cie ("Roman bleu"), 2001, 118 p.
Jordan et la forteresse assiégée, de Maryse Rouy, HMH ("Atout histoire"), 2001, 104 p.