Susanna Tamaro : Réponds-moi
Depuis Va où ton coeur te porte (1995), vendu à plus de cinq millions d’exemplaires, l’Italienne Susanna Tamaro connaît un succès mondial. Introspection, sens du récit, écriture vibrante et… foi catholique font sa renommée, lui assurant la fidélité de son public. Son succès ne se fait toutefois pas sans heurts, puisqu’elle est poursuivie pour plagiat, traitée d’imposteure et même d’écrivaine d’extrême droite. Qu’en est-il exactement?
Depuis Va où ton coeur te porte (1995), vendu à plus de cinq millions d’exemplaires, l’Italienne Susanna Tamaro connaît un succès mondial. Introspection, sens du récit, écriture vibrante et… foi catholique font sa renommée, lui assurant la fidélité de son public. Son succès ne se fait toutefois pas sans heurts, puisqu’elle est poursuivie pour plagiat, traitée d’imposteure et même d’écrivaine d’extrême droite. Qu’en est-il exactement?
Il est vrai en tout cas que le thème de la religion, du bien et du mal, hante les pages de ce livre, Réponds-moi, un recueil de trois longues nouvelles. Mais à travers les textes, le talent de la romancière ne se dément pas. En deux coups de crayon, Tamaro sait tracer des portraits saisissants, des personnages auxquels on s’attache le temps de le dire. Dans la nouvelle éponyme, Rosa vit chez son grand-oncle et sa grand-tante, à la campagne. Orpheline, elle apprend la véritable identité de sa mère entre les humiliations de ses tuteurs et sa solitude, son désespoir. "Les mois qui ont suivi ont été des mois d’obscurité, déchirés par des lueurs soudaines et très violentes. Tout me paraissait inutile, je ne supportais la compagnie de personne. J’allais en classe, et je n’entendais pas un seul mot de mes professeurs. Je passais des heures penchée sur mes livres, et je ne voyais défiler que des pages opaques."
Sans vie familiale, sans amour, sans espoir, la jeune Rosa, que l’on surnomme la bâtarde, cultive la honte d’elle-même. En grandissant, elle finira par retourner sa violence contre les autres, avec une sorte de plaisir, le seul qu’elle connaîtra.
Dans L’enfer n’existe pas, une femme entre dans la maison de son enfance, un lieu abandonné et en ruine. En contemplant ses souvenirs à travers la poussière, elle adresse à son mari une sorte de monologue, dans lequel elle raconte le drame qu’est devenue sa vie. Cet homme bien né, que ses parents voulaient qu’elle épouse, s’est révélé un bourreau. Mais c’est à elle-même que cette mère en veut, incapable de répondre à la haine et à la cruauté, comme figée par la peur et l’angoisse.
Enfin, dans La Forêt en flamme, un père évoque la relation avec sa petite Guilia, après que sa femme fut tombée dans une grave dépression.
Les drames de la vie (séparations, violence conjugale, morts, maladies, etc.) sont au centre des récits de Tamaro, qui connaît la psychologie humaine comme le fond de sa poche. Certains thèmes qu’elle développe ont beau être surannés (le péché, la culpabilité), on suit à la trace ces hommes et ces femmes qui ressemblent à tout le monde.
On a néanmoins la nette impression de lire des histoires d’un autre âge, d’un autre monde. Le mysticisme développé par Tamaro, son style rempli d’images d’ombre et de lumière, d’éclairs, d’orages, d’illuminations paraissent parachutés du 19e siècle. Un drôle de phénomène littéraire, où le pire et le meilleur se côtoient. Éd. Plon, 2002, 216 p.