Le Marcheur : de Pierre Fortin
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Le Marcheur : de Pierre Fortin

Ce premier roman de Pierre Fortin raconte une étrange histoire, digne d’un thriller psychologique, étiquette que lui ont d’ailleurs donnée ses éditeurs. Jean Landry, professeur de photographie à l’université, bascule dans un cauchemar. Paul Garant, son ami de longue date, raconte à Michèle, la fille du premier, comment s’est amorcée la dégringolade, et tente quelques interprétations.

Ce premier roman de Pierre Fortin raconte une étrange histoire, digne d’un thriller psychologique, étiquette que lui ont d’ailleurs donnée ses éditeurs. Jean Landry, professeur de photographie à l’université, bascule dans un cauchemar. Paul Garant, son ami de longue date, raconte à Michèle, la fille du premier, comment s’est amorcée la dégringolade, et tente quelques interprétations. Normal: les deux hommes se connaissent bien, et Paul détient le journal intime et les notes personnelles de son ami. "J’ai trouvé (…) ses textes personnels, le cahier dans lequel il transcrivait ses rêves. (…) Ce que j’avais devant moi ne correspondait pas à l’image de l’homme doux et créatif que j’avais en tête."

À travers ses confidences, on découvre peu à peu qui est ce quinquagénaire qui ne se remet pas du suicide de Marie, une de ses ex, et qui, plus tard, a craqué pour Anne, une étudiante de 19 ans. "Jean s’imaginait qu’il pourrait la rendre heureuse, vivre avec elle et commencer une nouvelle vie. Tant pis pour ceux de ses amis, de ses collègues ou de sa famille qui lèveraient le nez sur l’écart d’âge (…)." Et suivent les extraits de journaux, dans lesquels se révèle Jean Landry.

L’habileté de ce premier roman consiste à brouiller les pistes: car l’histoire d’amour est un élément parmi d’autres. Les archives dévoilent l’existence d’un collectionneur, qui aurait volé tous les documents personnels de Landry et notamment ses photographies, qu’il revend dans des galeries.

Bref, on le sent, l’enquête est ouverte, surtout que l’on trouve, devant chez Landry, le corps d’une jeune fille, et que tous les chemins mènent vers lui.

Pas d’angoisse ni de sueurs froides dans Le Marcheur, mais plutôt quête de la vérité: qui est cet homme qui oublie peu à peu de vivre, de s’alimenter, qui parcourt la ville pour voler des portraits, et qui, peu à peu, se referme comme une huître?

Et qui sont sa fille, Michèle? son ami, Paul?

Le filon de Pierre Fortin est bien exploité, la mécanique du récit, assez bien huilée. C’est au plan de l’écriture que se font sentir les faiblesses, comme celle de trop raconter, de trop parler. "J’ai interrogé les gens qui étaient mentionnés dans les textes, j’ai parlé à des femmes qu’il avait connues, et un peu comme dans une enquête policière, j’ai tranquillement établi la chronologie des derniers mois." Est-ce vraiment nécessaire d’appuyer par ces indications superflues ce que l’on est en train de lire? Trop de détails et d’explications alourdissent la narration, qui devrait se défendre d’elle-même. Mais Le Marcheur vaut le détour, car tous les premiers romans ne sont pas aussi prometteurs. Éd. Québec/Amérique, 2002, 218 p.