La Déferlante d'Amsterdam : de Yolande Villemaire
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La Déferlante d’Amsterdam : de Yolande Villemaire

L’an dernier, dans le cadre d’un programme de voyages littéraires, Yolande Villemaire séjournait dans un atelier-résidence d’Amsterdam. C’est certainement là, en flânant près du Rijksmuseum ou du Muziektheater, que l’auteure de La Vie en prose (1980) et des Petits Fruits rouges (2001) a imaginé les traits de Miliana, celle qui deviendrait l’héroïne de La Déferlante d’Amsterdam. Le fil d’un parcours véritable, croisé à celui d’une fiction amoureuse, allait créer la trame de ce récit intimiste et  poignant.

L’an dernier, dans le cadre d’un programme de voyages littéraires, Yolande Villemaire séjournait dans un atelier-résidence d’Amsterdam. C’est certainement là, en flânant près du Rijksmuseum ou du Muziektheater, que l’auteure de La Vie en prose (1980) et des Petits Fruits rouges (2001) a imaginé les traits de Miliana, celle qui deviendrait l’héroïne de La Déferlante d’Amsterdam. Le fil d’un parcours véritable, croisé à celui d’une fiction amoureuse, allait créer la trame de ce récit intimiste et poignant.

Miliana Tremblay, qui n’est pas romancière mais peintre, réside elle aussi dans un studio d’artiste de la Venise du Nord. En espérant s’éloigner du souvenir de Dragan, un homme connu et aimé à Montréal, elle sillonne une Amsterdam vaporeuse, longe ses interminables canaux, croise les spectres de Van Gogh, d’Anne Frank ou de quelque Juif d’une autre époque marchant vers la mort. Avec ses amis Elijah et Bavon, elle fréquente aussi beaucoup les soirées de poésie, se grisant de mots, croquant dans son cahier à dessin tel ou tel personnage, ou encore une "amazone des cités" passant par là (c’est ainsi qu’elle désigne ces femmes anonymes dont elle fait le portrait). Pour peu, sa fuite rimerait avec oubli. Mais il y a cet enfant au creux de son ventre, comme une partie de Dragan qu’elle porte en elle, et qui crée des remous proches du raz-de-marée.

Dans une imagerie aquatique accordée au titre, Yolande Villemaire traduit avec justesse l’errance de cette femme qui cherche avant tout à fuir une partie d’elle-même. Peu à peu, Miliana devra accepter d’être envahie par des forces qui la dépassent, un peu comme cet océan perçu en rêve: "Je suis la mer, la haute houle, la déferlante de ton âme la plus noire et tu me retiens à deux mains, mais je m’écroule sur toi, je m’écroule bienheureuse à travers les puissants courants de la vie sur cette planète."

Il y a ici et là de tels passages en italique, des ouvertures poétiques sans lesquelles l’histoire de Miliana serait parfois proche de la carte postale. Carte postale séduisante, cela dit, quand elle décrit Amsterdam la fabuleuse, ou lorsqu’elle part, sans prévenir, vers le nord du pays et que défilent sans fin les fermettes et les saules pleureurs vert tendre. Puis apparaît une troisième dimension dans le récit, une profondeur de champ. Les origines montagnaises de Miliana, en outre, vont résonner de plus en plus fort dans le texte et amener celle-ci à vivre ses émotions dans un rapport étroit avec la nature.

L’écriture de Yolande Villemaire est poétique mais nette, elle glisse avec souplesse d’une sphère à l’autre, du style journal de voyage à la plus troublante plongée intérieure. Si quelques éléments importants sont un peu négligés – la relation avec Dragan, que l’on suppose devenue dévorante, est trop peu développée pour expliquer l’étendue de ses conséquences -, la maîtrise littéraire et le souffle font leur oeuvre: tôt ou tard, la déferlante nous emporte. Irrésistiblement. XYZ éd., 2003, 96 p.

La Déferlante d'Amsterdam
La Déferlante d’Amsterdam
Yolande Villemaire