Ces artefacts que nous taisons : Art et artefacts, en poésie
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Ces artefacts que nous taisons : Art et artefacts, en poésie

Le Prix littéraire Jacques-Poirier – Outaouais n’a pas été remis en 2002: trop peu de candidatures jugées "valables". C’est dire tout le sérieux de ce prix… NICOLE DUMOULIN l’a remporté l’année suivante avec le recueil Ces artefacts que nous taisons, que les Écrits des Hautes-Terres viennent de publier, avec un bonheur certain, sans aucun doute…

D’emblée disons-le: vous trouverez de plus ardents défenseurs de la poésie que je ne le suis; si les siècles passés (jusqu’au dernier quart du XXe) ont donné des textes bouleversants dans ce genre littéraire (et ont même sauvé la vie, je n’en doute pas, de certains lecteurs) depuis – manque de recul? – ce qui se fait est souvent lourd, précieux, ampoulé… bref: un condensé de tout ce que l’on est en droit de détester en littérature.

Et pourtant, Nicole Dumoulin… Avec Ces artefacts que nous taisons, l’auteure démontre une maîtrise du genre, un plaisir de l’écriture juste, une aisance dans la forme plutôt rare en ces temps troublés. C’est que avons là affaire à une sensibilité artistique: Mme Dumoulin est active dans le milieu culturel de l’Outaouais depuis de nombreuses années; elle est notamment co-fondatrice du centre Axe Néo-7 et s’est impliquée dans de nombreux autres organismes culturels de la région.

Entre nature et amour, le recueil qu’elle propose pose un joli regard, parfois presque psychanalytique, sur bien des sentiments: "De nos peurs sans cérémonie / Nous conservons des coquillages et des livres / Avec ce regard flou de la mer…" Les mots, sélectionnés à la façon d’un diamantaire attentif à leur façonnement, renvoient souvent au lecteur de fortes images: "Qu’importe où nous sommes / Cendrillon enlève sa robe / J’effeuille mes métaphores en langues étrangères / Dans le murmure du ressac…" La facture de l’ouvrage est, elle aussi, remarquable, à l’image de plusieurs tirages des Écrits des Hautes-Terres: les illustrations de Diane Génier, tout à la fois pesantes et aériennes, posées ici et là avec intelligence, agrémentent (et alimentent) la lecture. Avec Nicole Dumoulin, même les déclarations d’amour prennent un autre résonance: "Le souffle court les mains moites / Je te dis vous / Dans la partance et l’oubli / Vous avancez".

Ces artefacts que nous taisons
de Nicole Dumoulin
Écrits des Hautes-Terres
2004, 104 p.