Marc Levy : Esprit, sors de ce corps!
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Marc Levy : Esprit, sors de ce corps!

MARC LEVY, l’auteur de La prochaine fois, ne se contente pas d’avoir écrit quatre romans à succès en quatre ans; il est également l’écrivain le plus vendu en France. Son premier hit, Et si c’était vrai?, a été adapté au grand écran par nul autre que Spielberg; ses comédies romantiques spirituelles, traduites dans plus de 30 langues, sont lues aux quatre coins du monde… Réflexions sur une gloire inattendue.

Marc Levy, écrivain franco-américain dans la quarantaine, n’a pas le profil de l’intellectuel type. Directeur d’une compagnie d’informatique puis d’un cabinet d’architectes, cet entrepreneur n’a jamais eu de passion pour la littérature. Pourtant, le rôle d’écrivain-globe-trotter lui va à merveille. La preuve, les maisons d’édition se l’arrachent; Spielberg s’est disputé avec cinq studios de cinéma pour son scénario; ses fans (surtout des femmes) se multiplient à travers le monde… Sans aucun doute, en quatre ans, Marc Levy a accédé au statut de star internationale – ce qui ne l’empêche pas de rester humble, discret et généreux. "Le succès, si on s’en approche trop, ça brûle! Comme je n’aime pas les mondanités, je suis très protégé du danger de la notoriété", explique-t-il.
Le succès du premier roman de Levy, une histoire d’amour invraisemblable écrite pour son fils, serait un pur fruit du hasard. C’est la sœur de l’écrivain, éblouie par son talent, qui aurait envoyé le manuscrit chez l’éditeur. Hasard ou pas, toujours est-il que Levy fait preuve d’une belle créativité: il ensorcelle ses lecteurs avec des intrigues bien ficelées, des personnages attachants, des récits de voyage pleins de petits détails charmants, une jolie sensibilité et un humour enfantin. "L’écriture, pour moi, a toujours été un divertissement. Avec la publication de Et si c’était vrai?, c’est devenu une passion, se rappelle l’auteur. Moi, j’ai surtout envie de raconter une histoire. J’ai envie de partager des émotions qui nous traversent tous et que je fais vivre aux personnages. Je n’ai aucune autre ambition que de faire vivre de bons moments à mes lecteurs, avec de l’humour et de la tendresse."

À la vie, à l’amour
Un architecte qui tombe amoureux d’une femme invisible dans Et si c’était vrai?, un ange et un démon qui se confrontent dans Sept jours pour une éternité: les lecteurs sont accoutumés aux penchants de Levy pour le surréel.

La tendance se confirme avec La prochaine fois, un thriller sur fond de marché de l’art qui se transforme rapidement en comédie romantico-ésotérique. Nous entraînant dans les rues et les cafés de Boston, Londres, Paris et Florence, Levy nous offre une histoire qui se lit d’un seul trait. Jonathan, un grand expert de l’art, planifie son mariage avec Anna. Il prépare de grandes ventes avec son meilleur ami Peter, commissaire-priseur pour Christie’s, tout en poursuivant ses recherches sur Vladimir Radskin, un peintre russe du 19e siècle ayant sombré dans l’oubli (et qui, en fait, n’existe pas). Ayant découvert des toiles inédites de son artiste fétiche, Jonathan voyage à Londres, où il rencontre Clara, une ravissante galeriste dont il tombe amoureux. Mais Clara et lui ont des visions communes: c’est comme s’ils s’étaient connus dans un autre monde…

Le reste du roman mène les lecteurs dans des visions un peu macabres. Les époques s’entremêlent, les mondes de Radskin et des amoureux se fusionnent; la vieille Alice Walton, une terrible chimiste qui cherche à se venger depuis trois générations, menace Clara et Jonathan. L’on découvre ensuite que tous les personnages du roman ont vécu dans d’autres corps, dans d’autres villes, et que leurs destins sont éternellement liés à celui du peintre russe. Après une lutte violente, Alice Walton, "une vengeance de l’aigreur et de l’égoïsme", triomphe: elle assassine Clara. Jonathan, lui, se suicide, sachant qu’il va retrouver sa belle dans un autre univers. "Mes personnages ont plutôt pour ambition d’avoir aimé que d’avoir réussi, explique Levy. Jonathan et Clara meurent à la fin du livre, mais leur amour, lui, survit. J’avais envie d’approfondir cette idée que malgré notre mortalité, nous avons la liberté de faire en sorte que nos sentiments échappent à la mort."

Malheureusement, le mystère ésotérique du vieux peintre russe ressuscité, s’il est intéressant au début, s’imprègne rapidement d’un goût douteux. Levy amorce une mise en abyme hasardeuse, où les personnages illustrent les thèmes d’un tableau disparu… La plume est lourde, l’accumulation de métaphores frôle le superficiel et de nouveaux personnages semblent constamment émerger aux moments creux. Surtout, l’ésotérisme alambiqué gaspille le charme d’un petit roman qui, sans ses prétentions spirituelles, aurait été tout à fait délicieux.

La prochaine fois
de Marc Levy
Éd. Robert Laffont
2004, 281 p.

La prochaine fois
La prochaine fois
Marc Levy