Festival de la BD francophone de Québec : Étude de cases
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Festival de la BD francophone de Québec : Étude de cases

Histoire de refléter un peu les nombreuses tendances actuelles dans la bande dessinée d’ici et d’ailleurs, voici le portrait de trois auteurs bien différents mais qui apportent chacun à leur façon une vision unique de cet art. Si FÉLIX MEYNET s’inscrit du côté du classicisme en BD, LEIF TANDE penche plutôt vers l’imagination ludique. Quant à ALBERT WEINBERG, il représente une valeur sûre.

Leif Tande

Dans le monde parfois mal connu (du grand public) de la bande dessinée québécoise, il faut avouer que Leif Tande est un cas. Rien de bien sérieux par contre, car le jeune homme lui-même ne se prend pas au sérieux plus qu’il ne le faut. On n’a qu’à consulter sa biographie, d’une folie absurde et réjouissante, qui le fait passer tantôt pour un réfugié politique norvégien en quête de stabilité, tantôt pour un dangereux descendant d’une famille de tyrans scandinaves pourchassée par la justice internationale…

Sérieusement, c’est à force de projets divers et nombreux – fanzines, illustrations… – que Leif Tande réussit à se faire remarquer ici des amateurs de BD. D’abord par une série d’albums qui sortent avant tout de l’ordinaire, iconoclastes et au trait vraiment original, toujours très simple mais qui fait son effet.

Un dessin volontairement naïf, mais qui masque à peine un goût bien développé pour un humour salement noir, grinçant et presque scabreux, où des personnages en apparence innocents recèlent des abîmes de méchanceté! À preuve, cette édition de l’abécédaire Pando le panda parue l’an dernier qui, d’un côté, montre un gentil panda en voyage autour du monde et qui, pris à l’envers, le montre malade autour du monde… Délicieux! "Pour les besoins d’un projet, explique Leif Tande lorsqu’on le rencontre, j’avais fait un abécédaire qui se voulait en même temps un livre pour enfants. Mais une fois terminé, me connaissant, je me suis dit qu’il fallait que j’en fasse une version tordue!" Une simple anecdote qui révèle bien cette envie irrésistible chez Leif Tande de pervertir ce qui, de prime abord, s’avérerait tout bonnement naïf. "Ça me vient tout seul, ces concepts, avoue-t-il candidement, même si j’aimerais bien avoir des idées d’histoires bien ordinaires parfois; mais, le plus souvent, c’est ce goût d’expérimenter qui reprend le dessus, d’aller m’amuser avec le médium…"

Membre fondateur de la formidable écurie Mécanique générale avec cinq autres collègues, Leif Tande s’est vu confier dernièrement l’adaptation d’un polar de la série du Poulpe, personnage de gauche créé il y a quelques années par le Français Jean-Bernard Pouy et façonné depuis par plusieurs auteurs. Le bouquin ne se retrouvera pas sur les tablettes avant des semaines, mais on peut affirmer, pour l’avoir lu, qu’il colle parfaitement à l’univers de Leif Tande.

Félix Meynet
Arrivé sur le tard dans le monde de la bande dessinée selon son propre aveu (il avait 28 ans), Félix Meynet ne s’est pas moins rapidement imposé comme un dessinateur fétiche auprès des amateurs. Une des raisons? Il n’y a qu’à voir l’affiche que le Festival présente cette année pour la deviner: à l’ombre du Château Frontenac, une pulpeuse jeune femme tout droit sortie d’une de ses séries esquive des balles de neige. Voilà donc la signature de cet artiste aux personnages aussi hauts en couleur que physiquement avantagés.

Le dessinateur n’a quand même pas perdu de temps puisque, pour sa première publication, il a réussi à obtenir les services de quelques scénaristes bien connus, comme Corteggiani et le prolifique Yann. Si c’est avec ce premier auteur qu’il se fait remarquer lors des aventures d’espionnage de Tatiana K., c’est sur la série de Double M que Meynet fait sa marque de façon durable comme dessinateur au trait classique mais aussi ludique. Pour lui, le scénariste Yann a élaboré dernièrement la série des Éternels, qui suit les péripéties d’une héroïne travaillant pour les services secrets des marchands de diamants.

Albert Weinberg
On ne présente plus Albert Weinberg. Ou plutôt, on ne présente plus son mythique personnage Dan Cooper, tellement le pilote de la Royal Canadian Air Force est passé dans l’imaginaire du monde de la bande dessinée… et dans celui des pilotes tout court! Et si l’auteur Weinberg a atteint ce statut, c’est non seulement à cause de la notoriété de sa série la plus connue, mais aussi parce que l’auteur belge a collaboré avec les plus grands de sa profession et qu’il a su, comme eux, faire école par son style et ses histoires.

Lorsqu’on connaît son Dan Cooper, on ne s’étonne pas que Weinberg ait aidé Hergé au scénario de On a marché sur la lune, à l’instar d’Edgar P. Jacobs. On a d’ailleurs souvent rapproché les deux auteurs par leur souci maniaque du détail, leur amour des sciences, souvent futuristes, et par leur style réaliste et très "ligne claire". Cette série a valu à Weinberg de faire figurer son célèbre héros au Hall of Fame du Musée de l’air d’Edmonton pour sa contribution à la profession! Le Festival profitera de sa présence pour célébrer les 50 ans de Dan Cooper en organisant quelques activités entourant l’auteur.