Olivia Joules ou l'imagination hyperactive : La vie rêvée des femmes?
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Olivia Joules ou l’imagination hyperactive : La vie rêvée des femmes?

Certes, elle avait de nombreux défauts. Émotionnellement instable, abonnée aux régimes bidon, dépendante du sexe masculin… La liste des tares de cette gente dame avait de quoi faire peur. Son physique ne correspondait guère à celui des modèles filiformes, sa libido prenait fréquemment le dessus sur son ambition professionnelle, sa gourmandise était inversement proportionnelle à la grandeur de son ego, et pourtant, combien de lecteurs avait-elle réussi à charmer grâce à sa spontanéité!

Seulement voilà, après avoir offert un second tome de ses déboires, après avoir pris les traits de Renée Zellweger sur écran géant, Bridget Jones a soudain tiré sa révérence. Afin de ne pas s’attirer les foudres de millions de fans déçu(e)s (et pour continuer à faire grossir un pactole considérable), Helen Fielding avait promis qu’un modèle féminin révolutionnaire remplacerait sa blonde héroïne. Plus chic. Plus moderne. Plus accompli. Une ambition qui a donné naissance à un personnage à ce point différent de son précurseur qu’il est difficile de concevoir qu’il soit issu de la même plume. Véritable James Bond en tailleur, Olivia Joules séduit aisément les tenants du sexe masculin, s’empiffre de viennoiseries sans s’inquiéter de l’hypothétique expansion de son postérieur et mène une existence remplie de défis. Comment résister à un être aussi fascinant? Même la quatrième de couverture l’annonce fièrement (et en caractères roses, s’il vous plaît): Nous sommes toutes des Bridget Jones. Nous rêverons toutes d’être Olivia Joules.

En êtes-vous si sûre, Mme Fielding? Permettez-nous de préciser que nous avons d’emblée douté de cette attestation, qui nous a semblé d’une prétention sans bornes. Et de rajouter que, vérification faite, notre instinct ne nous avait nullement trompé.

Les œuvres précédentes, que ce soient les confessions de celle que l’on connaît, ou même Cause céleb’, un premier roman au succès modeste, parvenaient à séduire grâce à une écriture à la fois légère et teintée d’humour. Il en va tout autrement dans le cas de cette intrigue mal ficelée qui sombre rapidement dans le grotesque. Si seulement la caricature n’était pas aussi flagrante, on pourrait fermer les yeux sur certaines maladresses. Mais dès que le récit s’engage sur la voie du western, à la différence près que ce sont les représentants du monde arabe qui remplacent les Indiens dans le rôle des méchants, tout désir de compréhension s’évapore d’un seul coup, laissant place à un hébétement sans nom. Car franchement, faire d’Oussama Ben Laden le figurant d’une telle fiction fait non seulement preuve de mauvais goût, mais aussi d’un manque de jugement sévère!

Après avoir refermé ce bouquin manichéen qui banalise le terrorisme et brosse des femmes un portrait pour le moins dégradant, le lecteur n’espérera qu’une chose: que l’idée ne vienne jamais à Fielding de faire passer Olivia Joules au stade de l’âge de raison…