Livres

Daniel Boivin, Danielle Dubé, Élisabeth Vonarburg, Alain Gagnon : Notes livres

Cette année ne fait pas exception: la rentrée littéraire 2004 est riche en nouveautés en tous genres: romans, nouvelles, poésie… En voici quelques-unes parmi ce foisonnement, toutes provenant d’auteurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean que vous pourrez rencontrer au Salon du livre.

CHRONIQUE DU QUOTIDIEN

Journaliste à CBJ Radio-Canada, Daniel Boivin est aussi romancier à ses heures. "Parce que c’est tellement frustrant, l’écriture journalistique! On est toujours pressés par le temps et pris dans l’espace toujours restreint." Trois Nuits au colibri est son deuxième roman, qu’il a écrit à coups d’une heure ou deux par jour, patiemment, pendant trois ans. "C’est un roman d’humeur, décrit son auteur, beaucoup plus qu’un roman policier." De fait, le roman raconte trois jours dans la vie d’un journaliste de la presse écrite, envoyé dans le fin fond de la campagne, quelques jours seulement avant Noël, pour couvrir un double meurtre. "Ce n’est pas du tout autobiographique, mais c’est basé sur une histoire vraie, précise le journaliste radio, une histoire qui m’avait beaucoup intéressé à l’époque." Un roman d’humour et de personnages bien tournés. "J’ai un faible pour J.-H., le chef de pupitre", avoue d’ailleurs Daniel Boivin. Pour une soirée vite passée.

Trois nuits au Colibri
Ed. JCL

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ÉCRIRE – RÉ-ÉCRIRE

Les Olives noires, premier roman de Danielle Dubé publié il y a 20 ans, a remporté le prix Robert-Cliche en 1984. Le voici réédité en format poche par les Éditions Typo. "Un vrai cadeau", selon son auteur. "Parce que j’ai eu la chance de le terminer", s’exclame-t-elle. En effet, puisque son manuscrit avait été primé au concours, l’auteure n’avait eu que fort peu de temps pour le retoucher avant sa publication initiale. Vingt ans plus tard, elle se replonge dans son bouquin. "Je n’ai pas touché à la forme, note Danielle Dubé, mais j’ai coupé et j’ai ajouté." Coupé sur le plan stylistique, pour resserrer le texte ou pour rendre les dialogues plus forts, plus percutants. Ajouté pour approfondir certains personnages, ou pour apporter des éléments qui donnent une autre dimension au texte. Les Olives noires est la petite histoire d’un couple de Québécois, avec leur petite fille et un ami, qui passent des vacances dans une Espagne secouée par les dernières années de la dictature franquiste tandis que le Québec est en pleine Crise d’octobre. Petite histoire dans la grande Histoire. Les rapports entre les hommes et les femmes aussi bien que la guerre, les conflits de couple comme ceux d’États, ce sont des sujets toujours très actuels, et le roman n’a rien perdu dans sa version de poche, au contraire! Pour un samedi dans un hamac.

Les olives noires
Ed. Typo

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PETITES AUTOS

Qui ne connaît pas Élisabeth Vonarburg et ses univers si riches? Les extraordinaires mondes de Tyranaël et du Pays des mères ont fasciné des milliers de lecteurs pendant des centaines et des centaines de pages. Mais connaissez-vous ses textes courts? Si ce n’est pas le cas, Vraies Histoires fausses, son dernier opus, vous en donnera l’occasion. Le recueil est composé d’un peu plus d’une vingtaine de tout petits textes – le plus long doit avoir au plus une dizaine de pages, le plus court deux ou trois -, de vraies histoires fausses, ou peut-être de fausses histoires vraies, c’est selon. "Quand bien même je dis ici que plusieurs textes de ce recueil sont autobiographiques, je dis que je mens". Vraies histoires fausses. C’est aux lecteurs de choisir comment ils lisent, ce qu’ils veulent lire dans ce qu’on leur raconte", confie l’écrivaine. De petits textes, donc, dont plusieurs ayant déjà été publiés auparavant, dans des revues par-ci par-là ou dans le recueil Un Lac, un Fjord, un Fleuve de l’Association des écrivains de la Sagamie-Côte-Nord. Répondant souvent à des thèmes imposés et s’échelonnant sur plusieurs années, ces textes "recueillis" ont une étonnante cohérence les uns par rapport aux autres. Quelques textes mettent tout de même en scène des univers de science-fiction, habituels aux romans d’Élisabeth Vonarburg, d’autres explorent l’enfance. D’autres encore ont pour héroïne une dame rappelant, étrangement ou pas, celle qui signe les textes. Vrais ou faux, on s’en délecte. À quatre par jour, à la pause du dîner.

Vraies histoires fausses
Ed. Vents d’ouest

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FAIT PAS SI DIVERS

Pour son dernier né, Jakob, fils de Jakob, Alain Gagnon s’est inspiré d’un fait divers, lu dans un journal un samedi matin. En gros: un homme s’est immolé sur la tombe de sa femme, qu’il avait aidée à mourir quelque temps plus tôt. L’homme était juif. Sa femme, allemande. "L’homme m’a donné sa mort. Il a fallu que j’invente sa vie. J’avais la fin, il a fallu que je remplisse les vides pour arriver à cette fin-là", raconte Alain Gagnon. En fait, l’écrivain confie n’avoir rien inventé, il n’a fait qu’écouter l’histoire qui tournait dans sa tête, et l’écrire. "J’avais une idée, je me suis assis et je me suis laissé emporter, précise l’auteur. L’histoire m’est racontée par je-ne-sais-qui. Il faut accepter que le texte est plus fort que soi. Quand on réfléchit trop, on bousille tout", continue celui qui a plus d’une quinzaine de romans à son actif, en plus des innombrables nouvelles et poèmes. Dans celui-ci, on suit Jakob. Enfant au début du récit, il connaît la guerre, il survit aux camps de concentration, d’où ne sortiront pas les autres membres de sa famille. Il traversera l’horreur comme il peut et se retrouvera au Québec. À travers l’histoire, on peut retrouver une critique féroce des Allemands, mais aussi des alliés, qui ont fait "pas mal de saloperies dans les prisons qu’ils géraient", remarque Alain Gagnon. Si le sujet est sombre, le récit ne l’est pas, le héros non plus. On reconnaît là toute l’habilité de l’auteur à raconter des histoires. Même si, comme il le précise encore, "Jakob s’est imposé comme ça, sympathique."

Pour un dimanche après-midi où il fait froid, où il pleut, où il vente. On s’en fout.

Jakob, fils de Jakob
Ed. Triptyque