Roger Paré : Plaisir des yeux

En fait, Roger Paré peut énumérer plusieurs bonnes raisons de s’installer devant sa table à dessin. "J’aimerais que tous mes livres soient publiés sous forme d’albums rigides, comme c’est le cas de mes traductions coréennes. Une fois qu’on a goûté à ça, on peut difficilement revenir en arrière!" lance l’illustrateur né en 1929. Malheureusement, précise-t-il, Les éditions de la courte échelle – qui, au demeurant, font fort bien les choses – doivent s’adapter à la clientèle, qui recherche souvent des livres peu coûteux. Et contrairement à il y a une vingtaine d’années, la compétition est maintenant féroce dans le créneau de la littérature jeunesse.

L’auteur de Plaisirs de chats (1988), Plaisirs de vacances (1995) ou plus récemment de Gracieux le monstre (2002) dessine depuis presque toujours: "J’ai fait mes premiers dessins vers l’âge de cinq ou six ans. Au début, je reproduisais ce que je voyais; que ce soit des lettres ou des maisons. Encore aujourd’hui, je reproduis ce que je vois, mais en m’inspirant de ma propre réalité, qui n’est pas nécessairement celle qu’on imagine. Par exemple, ça m’a pris plusieurs années avant de réaliser que les animaux de mes illustrations marchaient toujours sur deux pattes", explique Roger Paré, qui ne s’attendait pas à faire carrière dans le domaine de l’illustration de livres pour enfants.

Avant de publier au Québec, il a illustré des livres parus aux États-Unis. Puis, éventuellement, La courte échelle s’est intéressée à lui à cause de son travail de concepteur-illustrateur d’émissions pour enfants à Radio-Canada: "À l’époque, l’édition québécoise en était à ses débuts et il n’existait pas d’illustrateurs de livres pour enfants", se souvient-il. Puis son premier livre a été publié… et est passé inaperçu. "J’ai ensuite écrit et illustré L’Alphabet, qui a connu un immense succès ici et à l’étranger. Je dois avoir vendu près de 500 000 copies de ce dictionnaire. En comparaison, quand un auteur de romans pour adultes vend entre 500 et 1000 livres, il se pense bon. Par contre, lorsqu’il s’agit de vendre un million de livres pour enfants, on n’en parle pas. On considère que les livres pour enfants sont moins importants et je trouve ça injuste car ce sont les livres qui donnent le goût de lire aux jeunes", estime-t-il.

C’est d’autant plus vrai que le rôle de la série "Plaisirs", selon l’illustrateur, est justement de permettre aux enfants d’observer les nombreux détails à l’intérieur des dessins. "Je raconte une histoire à travers les images. Et le plus fantastique, c’est qu’ils repèrent généralement d’autres détails que je n’avais même pas vus!" s’exclame-t-il. Au fil des années, des milliers d’enfants (et d’adultes!) à travers le monde – en Allemagne, Espagne, Mexique, Corée, Australie, France, Japon, Canada anglais – ont tenu entre leurs mains des albums illustrés par Roger Paré, qui s’étonne encore de la portée de ses œuvres. "Ça me permet de constater à quel point le dessin est universel…"

Plaisirs de tendresse
de Roger Paré
Les éditions de la courte échelle
2004, 24 p.