François Désalliers : Espresso allongé
François Désalliers imagine avec talent la vie d’un homme dont l’existence bascule subitement lorsqu’il décide de refaire sa vie… dans un café.
Qui ne rêve pas de suivre subitement son instinct et de mener une vie conforme à ses seules aspirations? Telle est la question sous-jacente ou du moins l’élément fondateur de ce roman de François Désalliers, où le désir de liberté et d’authenticité semble vouloir subitement se charger du nouveau destin du personnage.
Rien apparemment ne prédisposait Jean-Marie Lalonde, conseiller en décoration depuis une quinzaine d’années, marié et père de deux enfants, à l’aventure qui allait totalement modifier le cours de sa vie: "Résidant à Label depuis 10 ans, Jean-Marie Lalonde est âgé de 40 ans, mesure 5 pieds dix pouces, pèse 165 livres, a les cheveux courts, les yeux noirs et une démarche assurée. Dans les heures qui ont précédé sa disparition, il paraissait sain d’esprit et portait un costume noir ainsi qu’une cravate jaune", peut-on lire dans une gazette peu de jours après le début de cette étrange aventure.
Entré par hasard dans un café pour y prendre un simple espresso, Lalonde s’y sent subitement si bien qu’il décide qu’il s’y faire enfermer le soir même. Se faisant passer les jours suivants pour un client habituel et s’endormant le soir dans un cagibi sur des sacs à café, il y restera ainsi une nuit, puis deux, trois… et finalement dix ans, acceptant en contrepartie de cette hospitalité de devenir une attraction pour les médias et les clients de la ville. Entouré d’une galerie de personnages variés et suivant les désirs nouveaux qui l’assaillent, Lalonde va alors vivre des aventures singulières. Et lorsque ses peintures viendront orner les murs du commerce achalandé, il sera définitivement consacré maître des lieux.
Déjà remarqué pour l’originalité de ses œuvres et ses qualités d’écriture avec Amour et pince-monseigneur (Grand Prix cégep de Saint-Jérôme pour une première œuvre en 1999) et Des steaks pour les élèves (2000), François Désalliers offre avec L’Homme-café un troisième roman délicieux, liant et si bien dosé qu’il est quasiment impossible d’en interrompre la lecture avant de l’avoir terminé. L’auteur parvient en effet à nous plonger directement au cœur de son aventure fantaisiste et à en activer les rouages à travers une imagination profuse, de nombreux rebondissements, et surtout une écriture remarquable. Ses qualités narratives, auxquelles se mêlent poésie, humour et théâtralité, modèlent ainsi cette sorte de fable de la vie moderne en un récit à la fois dynamique et ludique, propre justement à créer ce plaisir de la lecture qui accompagne un bon roman d’aventures.
L’Homme-café
de François Désalliers
Éd. Québec Amérique, 2004, 353 p.