À l'ombre de Sainte-Anne : À l'ombre d'une vocation
Livres

À l’ombre de Sainte-Anne : À l’ombre d’une vocation

À l’ombre de Sainte-Anne, le plus récent recueil de poésie de Pierre Demers publié aux Éditions Trois-Pistoles, est un passeport pour un voyage dans un passé malheureusement trop frais, que plusieurs Québécois connaissent et veulent souvent  oublier.

Le lecteur se retrouve, en temps réel, dans la peau d’un jeune garçon pensionnaire, à une époque quelque peu sombre où les pères et les frères, comme on l’avait fait avec eux à coups d’endoctrinements et de menaces d’excommunication, extirpaient des vocations du corps défendant de jeunes gens élus et en pleine puberté. Et nous voilà installés derrière l’œil lucide et parfois caustique d’un adolescent qui nous décrit, telle une peinture réaliste, les scènes dans lesquelles il se garde un rôle principal. En canevas de fond, la religion, évidemment, et puis en superposition, des lieux géographiques connus, des références historiques et culturelles, des descriptions scrupuleuses, analytiques et rigoureuses, qui convoquent nos annales personnelles; en avant-scène, un jeune homme perspicace que l’on devine débordant de curiosité et avide de liberté. Peu à peu, dans un vocabulaire résolu et familier sans équivoque, il fait la découverte du monde dans lequel il est enfermé – ses sens sont à fleur de peau et tout y passe: les émotions, les frustrations et les envies, les peurs, la révélation des plaisirs intimes, de la sublimation, le choc esthétique de l’art et de la littérature. Chacun des tableaux du livre devient alors une vision, une vue d’exception qui, après chaque chute, nous donne envie de nous relever et de tourner la page pour y rejoindre encore le narrateur et apprendre, sous un nouveau titre, la suite de l’histoire. Nous avons alors l’impression d’avoir droit au chapitre, chaque souvenir devient un peu le nôtre et nous renvoie à nos propres enfance ou adolescence, à notre propre expérience, quand des gens bien-pensants voulaient notre bien et qu’on nous destinait, nous aussi, à occuper une place privilégiée et honorable dans le rang.

À l’ombre de Saint-Anne
Pierre Demers
Éd. Trois-Pistoles, 88 pages