Sylvie Ouellette : De la tête aux fesses
La Québécoise Sylvie Ouellette, après avoir publié – avec succès – quatre romans en Grande-Bretagne, nous sert sa verve érotique dans une traduction de Michel Saint-Germain. Lecteurs prudes, s’abstenir!
Stéphane Despatie
"Le couple était tout aussi bruyant qu’avant, mais cette fois les gémissements de Manon étaient étouffés par la merveilleuse queue qu’elle avait en bouche." Avec une telle protubérance au milieu du sourire, nul besoin de spécifier que les protagonistes d’Une libertine en Nouvelle-France se livrent à bien peu de dialogues! Le roman de 336 pages n’est pas moins verbeux pour autant: parsemé de lourdes métaphores, mais aussi de légères dentelles stylistiques et d’images colorées, il y va de longues, de très longues descriptions des moindres gestes à connotation sexuelle, qu’il s’agisse d’actes préliminaires ou de scènes d’action. Ici, une simple description de fenêtre ou de rayon de soleil n’est pas dépourvue d’allusion, de langueur, et invite aux voluptés sommaires, aux stupres: "Le soleil qui entrait par la fenêtre la surprit par-derrière et projeta son ombre contre le mur. Laure vit sa propre silhouette, les courbes de ses hanches, la longueur de ses jambes, comme si sa chemise avait disparu."
LE JEU EN VAUT-IL LA CHANDELLE?
L’histoire, qui raconte les plaisirs d’une jeune domestique devenue subitement orpheline, n’est pas dépourvue de sentiments et d’un minimum d’intrigues, amoureuses mais surtout aventureuses. Mais chaque chapitre amène une situation qui n’est qu’un prétexte à la démonstration des penchants libidineux de la jeune fille sans dot. Tout peut servir les jeux érotiques, les chandelles par exemple, mais aussi les relations serviteur/maître qui peuvent être renversées par les pouvoirs de la sexualité. Et quand on joue avec les concepts de domination, parfois on se brûle au jeu; certaines situations révèlent d’étranges personnalités. Laure connaîtra aussi la ceinture de chasteté et subira les conséquences d’un grand incendie…
Bref, si vous aimez ce type de romans, celui-ci, qui se passe au début du 17e siècle dans les nouvelles colonies d’Amérique du Nord, remplit bien son rôle, en plus d’être assez bien mené. Si vous êtes peu habitués au genre, vous risquez de trouver le récit, disons, répétitif…
Une libertine en Nouvelle-France
de Sylvie Ouellette
VLB éditeur, 2005, 336 p.