Laurent Laplante : Je l’aime à mourir
Homme de paroles, Laurent Laplante s’est fait entendre, par écrit ou de vive voix, sur de nombreux sujets. Voici qu’il propose un roman sur le délicat sujet de la mort assistée.
"La mort me rejoint, mais lâchement." Dès la première phrase, le lecteur du dernier roman de Laurent Laplante, Je n’entends plus que ton silence, est parachuté dans le drame d’un homme, un drame auquel il assistera en première loge, tout au cours des quelque 170 pages du bouquin. Dès l’incipit, tout est placé: cet homme – Jean-Philippe, écrivain, la jeune soixantaine – est pris dans une incroyable impasse. La femme qu’il aime et avec qui il partage sa vie depuis 30 ans vient d’avoir un accident qui l’a plongée dans un profond coma. Pire, les examens révèlent que Julie est atteinte d’un cancer qui ne peut être soigné parce que déjà trop avancé. Quoi qu’il advienne, Julie est condamnée. Son mari entend l’accompagner dans cette agonie et lui épargner souffrances et état végétatif, mais quel était, au juste, le souhait de sa compagne? Autrement dit, quelle est la nature du geste qu’il veut commettre? Euthanasie? Suicide assisté? Meurtre? Sans relâche, il s’astreint à retourner à l’essentiel: la volonté de sa femme, inaccessible.
Nuit après nuit, au fil du journal tenu scrupuleusement, le lecteur a accès à l’intolérable souffrance de cet homme, à ses espoirs, ses tâtonnements, ses menues joies, ses chutes. "Le journal permet le côté exhibitionniste, analyse l’auteur; on a accès à tous les secrets sans censure. C’est écrit à brûle-pourpoint, ça a quelque chose de l’ébullition. On peut davantage être en contact avec le drame intérieur de l’homme."
S’il soulève autant de questions pour le moins délicates sur la société et l’individu, des cas de conscience bouleversants, le livre ne doit pas être abordé comme une thèse appuyée par la fiction. Nulle réponse ne vient soulager ni l’homme, ni le lecteur.
"Ce sujet ne date pas d’hier et me tracasse depuis longtemps, confie Laurent Laplante. Comme journaliste, j’ai été amené à réfléchir sur le sujet, à cause des cas célèbres fort médiatisés, notamment. J’avais déjà abordé la question à la manière d’un essayiste. Écrire de la fiction est pour moi moins naturel, donc plus difficile. Mais ça permet de mentir vrai. Personnellement, je n’aurais pas fait le même choix que mon personnage!"
Aucune certitude ne se risque dans les pages, sinon celle de l’amour absolu de cet homme pour la femme qu’il perd. C’est un roman d’amour.
Je n’entends plus que ton silence
de Laurent Laplante
Les Éditions JCL, 2005, 170 p.