Insulaires : Le tour de l’île
Le recueil de nouvelles Insulaires, de Christiane Lahaie, porte en lui l’âme fuyante et mystérieuse des Îles britanniques.
Récemment réédité en livre de poche par les Éditions de l’Instant même, Insulaires, le premier recueil de nouvelles de Christiane Lahaie paru en 1996, donne le pouls d’une Angleterre à la fois impressionniste et vivante. "Avant de visiter l’Angleterre, j’ai passé de longues soirées à imaginer les ponts de Londres, les piétons et les automobilistes distraits circulant du mauvais côté de la voie. Des journées entières, j’ai feint d’écouter le vent siffler entre les monolithes de Stonehenge."
Dans les quatorze nouvelles qui composent le recueil, on vaque entre les rues de Londres, à l’arrière de bus ou de black cabs, dans des pubs ou des auberges bondés, et avec l’objectif d’assister à une représentation de Macbeth. De façon originale, un récit en italique s’intercale en effet entre les différentes nouvelles, offrant une sorte de trame principale au recueil: à l’annonce de la mort d’un vieil ami anglais, une femme quitte le Nouveau Monde pour aller se recueillir sur sa tombe à Londres. Ce voyage est alors l’occasion pour elle de se laisser entraîner dans les moindres recoins de la ville, sur les traces de son ami disparu certes, mais aussi guidée par une attirance ancienne mêlée de mystère et d’une fascination qu’elle tente toujours de comprendre.
Se perdant ou poursuivant des chimères aux confins de landes ou dans les dédales de villes ancestrales, les personnages des nouvelles prennent alors place comme d’autres fils conducteurs. De Londres à Edinburgh, dans les passages dérobés de villes ou des paysages de campagne brumeuse, leurs divers destins se croisent dans des temporalités variables. Les personnages de Christiane Lahaie sont de fait souvent des êtres de passage, presque évanescents même, mais qui peuvent aussi surprendre autrement, telle une propriétaire qui prête une oreille attentive à ce qui se passe dans la chambre de ses locataires ou un homme obnubilé par des questions existentielles entre deux stations de métro.
L’auteure, pour qui la littérature britannique n’est pas étrangère, fait tourner ses histoires autour d’un pays qui lui est indubitablement cher. Autour de la perte de l’ami anglais s’articule ainsi l’ensemble du recueil. Après la mort, la narratrice qui croyait devoir "renoncer à la seule parcelle d’Angleterre qu’elle ait jamais possédée", entreprend finalement son voyage comme la reconquête d’une part perdue ou manquante.
Récipiendaire du Grand prix du livre de la ville de Sherbrooke en 2002 pour son second recueil de nouvelles Hôtel des brumes, Christiane Lahaie a également écrit un roman, La cour intérieure (1999), ainsi que plusieurs ouvrages sur le théâtre et la littérature.
Insulaires
de Christiane Lahaie
Éd. de L’instant même
2005, 136 p.