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L’âge dort

Depuis quelques siècles, grâce aux avancés scientifiques de l’homo Aparsonerectus

Sapienpasfor, l’espérance de vie de l’homme moyen atteint les 270 ans et des poussières

tandis que la place disponible sur terre pour y asseoir son cul est passé de carrément

restreinte à presque nulle.

En fait, chaque petite parcelle de surface terrestre est occupée et ce sur plusieurs étages. Des

milliers de minis autoroutes accueillent des défilés incessants de chaises roulantes. À droite

les chaises non motorisées, au centre les gros modèles hybrides et à gauche les supers

turbos.

Le paysage regorge aussi de méga pharmacies, de moult kiosques à dentiers, de boutiques de

prothèses bioniques et d’une quantité effarante de guichets de loteries.

Tout semble au ralentit et la musique d’ambiance dans les ascenseurs et les centres commer-

ciaux est toujours dans le tapis. Une fois les parties de quilles terminées, les festivités se

poursuivent dans les bingos jusqu’à tard dans l’après-midi.

Pour sa part Martha en a marre. En fait elle aimerait bien, à 176 ans, en finir une fois pour

toute mais c’est impossible car l’euthanasie et le suicide assisté ne sont toujours pas légaux

et qu’il est devenu infaisable de pouvoir se procurer un bout de corde et un tabouret. De plus

les techniques de réanimation, lorsque le corps est retrouvé dans les premières heures

suivant le décès, atteignent un taux de réussite de 99.7 %.

Voilà bientôt 63 années que Martha est déprimée et la centaine d’autres à venir ne semblent

guère plus réjouissantes à ses yeux. Jusqu’au jour où, sur un mur, un rare graffiti attira son

attention :

La mort existe. contactez le 20206010.

Le soir même elle souleva le combiné de son audiophone en tremblotant terriblement, signe

d’un mélange de nervosité grandissante et de parkinson vaguement contrôlé. Elle parvînt

finalement à composer le numéro.

– Oui ?

– J’appelle pour l’annonce.

– Les vacances prolongées sans billet de retour ?

– Oui.

– D’accord, retrouvez-moi au rond point de la tour du Nord dans une heure.

L’homme se présenta à l’heure. Elle s’approcha lentement de lui. Il lui susurra le plan à

l’oreille. Les yeux de Martha s’éclaircirent et après avoir rit, chose qui ne lui était pas arrivé

depuis des années, elle accepta.

Les préparatifs prirent une heure.

– Votre chaise est prête. Elle est passée d’une autonomie de 4 heures à une de 48 heures.

et ça c’est la pilule.

– Merci.

Martha la prit immédiatement et démarra sa chaise mais au lieu de retourner automati-

quement vers le foyer pour sa recharge habituelle, celle-ci se mit à suivre une trajectoire

aléatoire. Martha s’endormit rapidement.

Morte, le visage rayonnant, elle termina sa course face à l’institut général de soins intensifs de

longue durée où une jeune équipe dynamique de réanimateurs la reçurent avec enthousiasme

afin de tester leur dernière trouvaille scientifique : le lit de résurrection.