Monique Juteau : Planète magique
Avec Monique Juteau, la réalité s’envole. Elle devient un délicieux bonbon surprise. Dans Le voyage a dit, elle fait place à un Bombay, à un Hanoï ou à un Istanbul légèrement empreints de magie.
Issue de l’école de la poésie, Monique Juteau enjolive toujours le réel. Tout est possible dans ses œuvres. La fiction déborde du côté de l’imaginaire et adopte des angles insoupçonnés. Son récit Le voyage a dit, qui repose sur une part d’autobiographie, n’échappe pas à cette "règle". Il raconte les aventures fantastiques d’un couple amoureux parti à la découverte du monde oriental. Il livre de manière impressionniste des souvenirs fragmentés, embellis par un réalisme magique. Ainsi peuvent exister les tapis et les hommes volants.
Le voyage a dit (un clin d’œil à l’écrivain palestinien Mahmoud Darwich) abrite en ses pages plusieurs mois d’excursion à l’étranger: l’Inde, la Turquie, le Vietnam, la Thaïlande… Tant de parfums que de rencontres surprenantes. Profitant de la tranquillité matinale des chambres d’hôtel, l’auteure de Bécancour a noté quotidiennement ses observations à l’intérieur de grands cahiers. À son retour au pays, elle y a ajouté un peu de texture. "Je suis une redoublante. Moi, quand je reviens, je refais le voyage. Soit j’ajoute des données que je n’avais pas quand j’étais sur les lieux, soit j’intègre ce qui se passe dans mon présent", dit-elle en songeant tantôt à sa mère, tantôt à la maladie aujourd’hui guérie de son conjoint. Une sorte de pèlerinage pour se soustraire d’une approche journalistique. "Je pense que le défi du récit de voyage est de ne pas trop tomber dans le documentaire et d’avoir un côté fictif qui nous entraîne dans le récit." Heureusement, la poète connaît la route. "J’écris comme si j’étais un peintre impressionniste. Tout ce que je reçois, je l’intègre à moi-même et j’en fais un récit où les sens ont beaucoup d’importance."
Inconsciemment, le récit épouse l’évolution spirituelle du routard. "Quand tu commences un voyage, tu es plus fasciné par les décors, l’architecture, les paysages… Peu à peu, tout ça se place et tu te tournes vers les gens. Je pense que le roman est un peu construit comme ça. Au début, c’est la description de ce qui se passe. On est dérouté. Il y a plein de choses qui nous arrivent. Après, les personnages entrent tranquillement et s’installent plus longtemps à la table."
Le voyage a dit
de Monique Juteau
Les Éditions Varia, 2005, 120 p.