Alain Beaulieu : Vision mondiale
Alain Beaulieu ne veut pas être considéré comme un auteur moralisateur, mais il ne veut pas non plus écrire des romans jeunesse vides de sens. Aux portes de l’Orientie constitue donc un beau compromis entre action, magie, humour et bons sentiments.
Dans Le Solo d’André, son premier roman jeunesse paru en 2002, l’écrivain originaire de Québec aborde les thèmes de la poursuite du rêve et de la persévérance, deux sujets qu’on retrouve également dans Aux portes de l’Orientie. Le courage, l’amour paternel et la conviction que tout est possible sont aussi des éléments importants de son deuxième roman, qui raconte les aventures de Jade et Jonas, des jumeaux qui se rendent à l’autre bout du monde pour retrouver leur père, qu’ils croient disparu lors d’une mission pour la paix organisée par l’AsArCO (l’Association pour l’Arrêt des Combats en Orientie).
Oui, l’auteur véhicule un message, mais selon lui, il n’est pas moralisateur: "Lorsqu’on lit le roman, on réalise que tous les points de vue sont présents. Même les guerriers, qui sont censés être les méchants, ont l’occasion de donner leur opinion. Je ne crois pas être du côté de la morale, et je n’aime pas beaucoup le mot message, mais c’est vrai qu’il y a des trucs que j’aimerais que les jeunes retiennent. Notamment au sujet de la solidarité qui existe entre Jade, Jonas, et les deux Orientiens qui les aident à retrouver leur père. Lorsqu’on regarde à la télévision les images qui nous viennent du Moyen-Orient (l’équivalent de l’Orientie dans le livre), on finit par se dire qu’il n’y a pas d’espoir et que la guerre ne se terminera jamais. J’aimerais malgré tout croire qu’il existe encore une part d’humanité dans ce coin de pays. Si on veut parler d’un message, c’est celui-là que j’aimerais qu’on retienne", explique l’auteur des romans pour adultes Le Joueur de quilles (Québec Amérique, 2004) et Le Fils perdu (Québec Amérique, 1999), en outre.
La première incursion d’Alain Beaulieu en littérature jeunesse était le fruit du hasard. Si bien que lorsqu’il a eu l’occasion de rencontrer ses jeunes lecteurs dans les écoles, l’auteur s’est rendu compte que les 9 à 12 ans trouvaient Le Solo d’André un peu trop pépère pour leurs goûts. L’écrivain s’est donc donné pour défi dans son second livre de leur offrir matière à réflexion, mais aussi beaucoup d’action et des éléments de fantastique, qu’on retrouve sous les traits de deux personnages ludiques. Il s’agit de Jack Poissant, un superhéros généreux mais maladroit, et Lucette, une fée pas plus grosse qu’un champignon qui masque sa gentillesse sous une fausse mauvaise humeur assez comique. "C’est grâce aux éléments fantastiques que Jonas et Jade peuvent se rendre en Orientie pour secourir leur père, mais c’est aussi ce qui me permet d’aborder les éléments plus réalistes et tragiques de l’histoire", estime l’auteur. Soulignons d’autre part que l’humour, toujours sous-jacent, sert aussi à désamorcer les scènes dramatiques du roman où Jade et Jonas prennent conscience des dures réalités de la guerre, et de leurs conséquences sur l’existence de leurs nouveaux amis Brama et Salman.
De nos jours, ce n’est pas le choix qui manque en matière de littérature jeunesse. Dans ce cas, comment fait-on pour attirer – et retenir – l’attention des lecteurs? "En ne les prenant pas pour des cons, croit Alain Beaulieu. Je dédicace le roman à tous ceux qui ne sont pas assez idiots pour croire que la paix mondiale est possible, mais quand même assez fous pour y travailler. Dans cet ordre-là, je crois leur offrir un livre qui ne les prend pas pour des idiots. Parce que tout n’est pas blanc ou noir, les lecteurs peuvent se faire leur propre opinion, et je pense que c’est ce qui va les intéresser", conclut l’auteur, qui fera par ailleurs revivre plusieurs personnages d’Aux portes de l’Orientie dans un futur tome. Par ailleurs, il entend lancer l’automne prochain un cinquième roman pour adultes.
Aux Portes de l’Orientie
d’Alain Beaulieu
Éd. Québec Amérique Jeunesse
2005, 272 p.