Jean-Paul Daoust : Le tour de l’île
Jean-Paul Daoust, l’oiseau de feu de la poésie québécoise, a accepté d’être le porte-parole de la 7e Quinzaine de la poésie, une pléthore d’activités qui, du 12 au 29 mars, va faire résonner notre poésie aux quatre coins de Montréal.
Que ce soit au Festival Voix d’Amériques, au Festival international de littérature, au Marché de la poésie, au Metropolis bleu ou sur quelque tribune plus ou moins régulière, la poésie est bien vivante à Montréal. Peut-être davantage hors des livres que dedans, d’ailleurs. Or il n’est pas toujours facile de la faire goûter à d’autres groupes que ses publics habituels.
Avec une programmation métissée, audacieuse, et surtout qui essaime un peu partout dans les réseaux des bibliothèques et des maisons de la culture, la Quinzaine de la poésie contribue de plus en plus au rayonnement du poème fait ici et aujourd’hui. On en discute avec Jean-Paul Daoust, Prix du Gouverneur général en 1990 pour son recueil Les Cendres bleues et animateur très aimé de notre scène littéraire.
En quoi se distingue la Quinzaine, qui est organisée par la Ville de Montréal, des autres festivals et événements où la poésie a voix au chapitre?
"D’abord, la Quinzaine est un événement qui va vers les gens. Comme la plupart des quartiers accueillent des manifestations, tous les Montréalais pourront assister à une activité à proximité de chez eux. Il y a déjà une barrière de moins par rapport aux festivals qui se déroulent en un lieu fixe. Et surtout: tout est gratuit! Il suffit de se procurer un laissez-passer."
L’édition 2006 de la Quinzaine paraît spécialement touffue, n’est-ce pas?
"Cette année, dans le cadre de Montréal, capitale mondiale du livre, il est clair que la Ville met un accent particulier sur l’événement. On attend pas moins d’une centaine d’artistes provenant du milieu littéraire, mais aussi d’autres milieux. Et preuve que la Quinzaine veut traiter le sujet en profondeur, le tout débute par un grand débat organisé par la revue Liberté à la maison de la culture du Plateau-Mont-Royal, le 12 à 15 h. Ça s’intitule "Économie de la poésie" et le point de départ sera l’achat récent de Sogides [qui, rappelons-le, comprend les Éditions de l’Hexagone] par Quebecor Média. Il est intéressant que l’événement fasse une place à de telles discussions; qu’on se pose ensemble la question: est-ce que la poésie appartient obligatoirement à une logique marchande, ou si elle peut s’inscrire à contre-courant?"
Espérons que des gens de Sogides et Quebecor seront présents… Sinon, quels seront les faits saillants?
"La liste est longue, mais je trouve pertinent d’intégrer le cinéma à la Quinzaine, par exemple à travers les films d’André Gladu sur Gaston Miron et Gilles Vigneault. Il y a aussi le film Les Guerriers, réalisé par Micheline Lanctôt à partir de l’oeuvre de Michel Garneau et qui met en vedette Patrick Huard et Dan Bigras. Le théâtre est aussi présent, avec entre autres Histoires réelles et imaginaires d’une très ancienne famille, cette lecture d’un texte du poète grec Yannis Ritsos organisée par le Théâtre de l’Opsis (avec Hélène Loiselle, Monique Miller et Benoît McGinnis).
Sinon, le 21 mars, Journée mondiale de la poésie, il y a bien sûr beaucoup à voir. Entre autres, le spectacle de Martine Francke présentant des chansons méconnues de Prévert, ou la lecture que va faire Claudine Bertrand de ses textes. Un peu plus tard, il y a aussi un récital de textes marquants (de Verlaine à Miron) par Angèle Coutu, puis un spectacle multimédia des Productions Rhizome… C’est vraiment très diversifié."
Êtes-vous d’accord pour dire que depuis quelques années, on perçoit un souci plus grand, de la part des poètes, de bien dire la poésie?
"Oui, avec tous les événements qui nous donnent les moyens de raffiner nos méthodes, on voit apparaître certaines techniques; les poètes osent plus qu’avant des manières nouvelles. On dira ce qu’on voudra: quand le plat est bien présenté, ça aiguise l’appétit!
Rien ne peut remplacer la voix du poète, mais pour moi, c’est aussi une très bonne chose que des gens comme Chloé Sainte-Marie s’approprient parfois nos poèmes. Ça permet aux gens de découvrir la poésie autrement, c’est un point de départ pour ceux qui sont moins habitués au genre."
Jean-Paul Daoust, vous avez porté bien des chapeaux au cours de votre carrière, au propre comme au figuré d’ailleurs! Or ce rôle de porte-parole constitue une première…
"Eh oui… J’ai animé toutes sortes d’activités de lecture, mais je n’ai jamais eu ce mandat. Je suis très heureux, étant donné mon attachement à la poésie mais aussi à Montréal, qui est, sur le plan identitaire, au centre de ma vie. Quelle ville fabuleuse sur le plan culturel… Et que la Quinzaine prenne sa place parmi les événements qui comptent, ça n’enlève rien, je pense, aux autres. Ça contribue tout simplement à ce que la poésie occupe la place qui lui revient…"
Programmation complète et horaire: www.ville.montreal.qc.ca/culture
Du 12 au 29 mars
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