Rentrée littéraire québécoise : Marque-page
En cette rentrée littéraire québécoise, quantité et qualité semblent encore au rendez-vous. Pour vous aider à vous y retrouver, quelques titres à surveiller…
Et si nous commencions par une maison qui a connu de grands changements cette année? Les Éditions Alto, qui étaient sous le parapluie des éditions Nota Bene depuis leur récente arrivée dans le paysage, volent maintenant de leurs propres ailes. On y publie en octobre une histoire d’ouragan avec L’Oeil de Claire du Canadien anglais Paul Quarrington, qui connaît déjà un certain succès dans le plus beau pays au monde, mais qui est pour la première fois traduit en français. Pour sa part, la nouvelle venue Sophie Beauchemin nous propose Une basse noblesse, alors que Patrick Brisebois, le même qui s’était fait remarquer à la défunte maison l’Effet Pourpre, nous revient avec Catéchèse, un roman qu’Alto situe à mi-chemin entre les romans de terroir et d’anticipation. À la même enseigne, un collectif signé Alexandre Bourbaki qui compterait entre autres la plume de Nicolas Dickner (Nikolski). Le prête-nom serait né à Limoilou en 1973, d’une famille de transfuges soviétiques…
Parlant russe, mais cette fois-ci pour vrai, Elena Botchorichvili, née en Géorgie et vivant à Montréal, offre Faïna, un troisième roman traduit par Carole Noël et publié, comme ses précédents, au Boréal. Chez le même éditeur, des nouveaux romans de Normand Corbeil, de Lisa Moore et de France Théoret. L’éditeur mise sûrement beaucoup sur le succès probable de La lune dans un HLM, de Marie-Sissi Labrèche, qui décrit la relation entre une jeune peintre ambitieuse de vingt-trois ans et sa mère, sorte de schizophrène sur qui elle a l’obligation de veiller, carrière ratée ou non. Dans un autre registre, Le personnage secondaire, un récit de Carl Leblanc, cinéaste, qui retourne sur les traces du diplomate James Richard Cross, la victime du kidnapping qui déclencha les événements d’octobre 70, promet d’aborder le sujet sous un angle moins fréquenté.
L’Histoire semble en stimuler plus d’un, comme le démontre le catalogue de VLB, qui compte entre autres sur Anne-Marie Sicotte et son premier tome des Accoucheuses, qui retourne dans le faubourg Sainte-Anne du Montréal de 1845. Gunni le gauche de Diane Lacombe se passe quant à lui en Europe du Nord, en 1019, où l’on suivra, à la manière d’un thriller, les traces d’un jeune Viking païen. Tiré d’une légende de la région de Sherbrooke, 1704 de Mylène Gilbert-Dumas attirera certainement l’attention, tout comme le livre gagnant du prix Robert-Cliche, annoncé le 31 octobre.
Si on donne surtout, chez Septentrion, dans les essais historiques, deux livres invitent un lectorat différent: Dernière escale, le journal de Jean-Paul Desbiens (Les Insolences du frère Untel), mort en juillet dernier, et Méditation sur la chasse de Ortega Y. Gasset, préfacé par Louis-Gilles Francoeur, qui ramène la chasse à une relation intime et respectueuse avec le cycle de la vie et n’hésite pas, du même souffle, à contester la chasse photographique.
Pour demeurer dans la controverse et la contestation, Andrea Langlois et Frédéric Dubois présentent Médias autonomes, chez Lux Éditeur, un ouvrage qui creuse dans la marge, celle des médiactivistes, et qui démontre l’avancée des altermondialistes grâce aux nouvelles technologies du monde des communications. Aux Presses de l’Université de Montréal, on propose Diversité et indépendance des médias, un collectif dirigé par Isabelle Gusse. Du côté de chez Fides, on se consacre essentiellement aux essais, dont Le cinéma au Québec: tradition et modernité, sous la direction de Stéphane-Albert Boulais, qui privilégie la période de 1960 à 1980, témoignant de l’effervescence du genre et permettant de mieux comprendre la santé actuelle et les possibilités futures du septième art au Québec.
À la courte échelle "adulte", on mise sur les rééditions en format poche de l’oeuvre intimiste de Raymond Plante et sur un polar d’André Marois: Accident de parcours. Au Marchand de feuilles, un premier roman, L’oeuf guerrier de Yann Francis, un Montréalais de 33 ans qui a vécu en Afghanistan, et Alia, un quatrième roman de Mélikah Abdelmoumen, née en 1972, qui nous avait donné Chair d’assaut (1999), un bon livre qui rappelait le style d’Hubert Aquin. Chez Leméac, si on attend évidemment Lignes de failles, le nouveau Nancy Huston, septembre amènera aussi Entretiens, un récit autobiographique du comédien et metteur en scène René Daniel Dubois, et La Russie des illusions, un essai de l’ancien correspondant en Russie de Radio-Canada, Michel Cormier. Il faudra attendre la fin octobre pour lire le nouveau Michel Tremblay, qui retourne aux sources.
Aux Allusifs, le nouveau Sylvain Trudel, La Mer de la tranquillité, fera sûrement des vagues, et on aimerait aussi faire mieux connaître l’Américain Walter D. Wetherell avec Un siècle de novembre. Chez les Franco-Ontariens, l’éditeur Prise de parole publie un nouveau Marguerite Andersen et À grandes gorgées de poussière de Myriam Legault. Aux Éditions Trois-Pistoles, Victor-Lévy Beaulieu sort enfin son James Joyce, l’Irlande, le Québec, les mots qui, sur le plan de la forme, s’apparentera peut-être à son célèbre Monsieur Melville. À surveiller aussi, dans la collection "Écrire", Louis Hamelin partageant les moteurs de travail. Chez Stanké, on attend le nouveau roman du bloguiste Matthieu Simard, tandis qu’à L’Instant même, paraîtront des titres de François Blais, de Marie-Jeanne Méoule, de Danielle Dussault et de Patrick Tillard.
Si à la Pleine Lune on fait dans la nouvelle avec Salah Benlabed et Georges Guy, chez XYZ, ce sont les romans de Sergio Kokis (dont on parle déjà beaucoup), de Madeleine Ouellette-Michalska, de Jean Désy et de Donald Alarie qui marqueront l’automne. Aussi, un récit du poète Claude Beausoleil, Alma, pourrait surprendre, tout comme Bonheur Tatol de François Barcelo.
Chez Planète rebelle, le recueil Sur le chemin des contes dresse un bel éventail des conteurs de différents horizons (Espagne, Irlande, Liban, France, Haïti), et aux Intouchables, on attend Sainte-Victoire de Claire Pontbriand, alors que la filiale Lanctôt propose Bancs publics, un collectif regroupant plusieurs personnalités. Québec Amérique frappe fort avec un grand nombre de nouveautés dont des romans d’Alain Beaulieu, de Joël Hynes, un récit érotique de Jean-Yves Colette, le premier président de l’UNEQ, des nouvelles de Normand de Bellefeuille, un nouveau Dominique Demers qui fera certainement le bonheur des libraires, et surtout, un nouveau Andrée A. Michaud, une romancière à suivre, qui propose Mirror Lake.
Chez Triptyque, pas moins de six romans et un recueil de récits (de Marc Vaillancourt). Retenons Le secret de Fulvio Caccia, qui nous avait donné le beau et exigeant roman La ligne gothique, ainsi que Le truc de l’oncle Henry d’Alain Gagnon. Hélène Lépine intrigue avec un titre comme Le vent déporte les enfants austères, qui semble être un roman tout en nuances et en poésie. Chez HMH, un recueil de nouvelles de Naïm Kattan, des romans d’Alain Raimbault, de Michel Leclerc et deux nouveaux romans historiques de Michel David. Finalement, chez Varia, Duras, l’impossible, un récit de Danielle Laurin qui dirigera également une collection de portraits d’artistes débutant avec la photographe montréalaise Raymonde April.
Voilà, en quelques lignes, plusieurs des titres à surveiller cet automne. Si nous ne pouvons survoler tous les genres, sachez qu’un papier consacré à la rentrée poésie viendra bientôt. Bonne lecture!