Fulvio Caccia : Le manuscrit maudit
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Fulvio Caccia : Le manuscrit maudit

Le Secret de Fulvio Caccia, entre le roman policier et le roman canonique mettant en scène la littérature, bouscule les genres et intrigue le lecteur.

C’est autour d’un mystérieux manuscrit que s’articule Le Secret de Fulvio Caccia, qui boucle la trilogie entamée en 2004 avec La Ligne gothique et poursuivie par La Coïncidence en 2005. S’il n’est pas nécessaire d’avoir lu les précédentes fictions de l’auteur pour apprécier ce dernier opus, ceux qui connaissent déjà le travail de ce Québécois d’origine italienne qui vit à Paris depuis des années seront étonnés de constater à quel point sa prose est plus accessible qu’au début de l’entreprise.

Caccia ne craint pas de s’aventurer à nouveau sur des territoires risqués sur le plan formel, avec des jeux narratifs parfois audacieux, de même qu’il semble prendre un malin plaisir à multiplier les rebondissements, et le roman pourrait toucher un large public amateur d’intrigues policières ou amoureuses. Nous avons beau être à dix mille lieues des manières et du ton d’André Gide, n’empêche que les procédés et les différentes astuces pour séduire et happer le lecteur se rapprochent de celles utilisées dans Les Faux-Monnayeurs. Il y a non seulement une mise en abyme, une enquête et quelques démêlés amoureux, mais le livre regorge de références au métier d’écrivain ou à celui d’artiste. Mais si le narrateur de Gide nous infantilisait en nous prenant par la main, celui de Caccia, lorsqu’il sort de son cadre de narrateur-personnage pour s’afficher clairement comme le maître d’oeuvre du roman que l’on tient entre les mains (sans par contre être Caccia lui-même, car nous demeurons dans la fiction de A à Z), plutôt que de nous guider, vient surtout troubler le contrat de lecture et brouille davantage les pistes qu’il ne les éclaire, comme il le prétend. Ce narrateur supplémentaire, si on peut l’appeler ainsi, est d’ailleurs le maillon faible du roman, car il fait en sorte que l’on sort momentanément d’une spirale au demeurant si bien tissée.

Fulvio Caccia, comme poète, a su se distinguer – Prix du Gouverneur général en 1994 pour Aknos (Guernica) -, et son roman La Ligne gothique fascinait par l’audace et la maîtrise du style, et aussi parce que le livre supportait courageusement et efficacement une structure complexe et exigeante. En comparaison, Le Secret se prend comme un bonbon, tant on se laisse emporter aisément par l’histoire, qui finalement, n’est pas si facile à absorber, mais facile à suivre, au sens où l’on dévore les pages, à l’affût du moindre signe qui pourrait nous expliquer ce que ce manuscrit, sujet principal du roman, a de si précieux pour provoquer autant d’événements et susciter autant d’intérêt chez des gens apparemment aux antipodes. Et le roman, brillamment, conserve le même mystère à la lecture que semble contenir ledit manuscrit. Personnages du livre et lecteurs semblent construire ensemble, et à leur insu, un secret qui se défile comme une rumeur.

Le Secret
de Fulvio Caccia
Éd. Triptyque, 2006, 217 p.

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Le Secret
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Fulvio Caccia