Kathy Reichs : L’inconnu de Massada
Kathy Reichs l’avoue, le sujet de son huitième roman rappelle le Da Vinci Code. Mais que le lecteur se rassure, À tombeau ouvert n’est pas une pâle imitation du roman de Dan Brown.
Quand le Dr James Tabor, un expert en archéologie biblique et collègue de Kathy Reichs à l’Université de Caroline du Nord, section Charlotte, l’a approchée pour lui parler de ce qu’il qualifiait de bonne histoire pour "sa fille" (Temperance Brennan), l’anthropologue judiciaire a souri. Ce n’était certes pas la première fois qu’on lui disait avoir un bon sujet de roman à lui présenter.
Elle a donc rencontré le Dr Tabor malgré son scepticisme, et elle ne le regrette pas: "Il m’a montré une photo en noir et blanc d’os découverts durant les travaux d’excavation qui ont eu lieu à Massada dans les années 1960. Il m’a expliqué que rien n’avait été publié à leur sujet, et que le seul squelette entier trouvé dans cette grotte avait disparu. Son histoire a tout de suite enflammé mon imagination. C’était effectivement une excellente idée", s’exclame l’écrivaine, qui met aussi ses connaissances d’anthropologue judiciaire au service du Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale de Montréal, en plus d’enseigner à l’Université de Charlotte, en Caroline du Nord.
Comme son précédent roman Meurtres à la carte (2005), l’intrigue d’À tombeau ouvert débute à Montréal, durant l’autopsie d’un commerçant juif mort dans des circonstances douteuses. Tandis que Tempe s’efforce de réconforter la mère et l’épouse d’Avram Ferris, un homme se présente à elle et lui remet une photo en noir en blanc d’un squelette. Il ajoute que c’est à cause de la photo que son ami est mort. Intriguée, Tempe tente alors de trouver des réponses aux nombreuses questions que suscite la photo. Et ce qu’elle découvre la stupéfie: le squelette pourrait être celui de Jésus! Consciente que sa découverte remettrait en question les fondements de la religion catholique, elle veut à tout prix prouver ses conclusions, et pour ce faire, un voyage en Israël s’impose.
Tempe s’envole donc pour Jérusalem avec le détective Andrew Ryan de la SQ, qui tente pour sa part d’identifier celui qui a tué Ferris. C’est la première fois que Kathy Reichs permet à son alter ego de vivre aussi intensément sa liaison amoureuse avec Ryan. À ce sujet, certains lecteurs ayant lu la version originale anglaise d’À tombeau ouvert, Cross Bones, ont écrit à l’auteure pour lui dire que le moment était venu de tuer Ryan: "Mais la plupart des lecteurs l’aiment bien", s’empresse-t-elle de souligner. Précisons quand même que tout en donnant une touche de légèreté à l’histoire et à ses ramifications religieuses, la relation Tempe/Ryan ne prend jamais le pas sur l’intrigue principale, saisissante. On lit À tombeau ouvert avec avidité, ne serait-ce que pour s’assurer qu’il s’agit bien d’une oeuvre de fiction. Avec beaucoup de dextérité, Kathy Reichs parvient à rendre floue la démarcation entre roman et réalité.
L’écrivaine, qui produit aussi la série à succès Bones, inspirée de sa vie (mercredi, 20 h, sur Fox et Global), confirme qu’en écrivant À tombeau ouvert, elle avait pour but de rendre son histoire aussi plausible que possible. Par souci du détail, elle s’est rendue à Jérusalem en compagnie du Dr Tabor, qui lui a permis de rencontrer des experts capables de l’aider dans ses recherches: "On a notamment visité des musées et on s’est rendu au tombeau de Silwan dans la vallée de Hinnom. J’ai fait beaucoup de recherches, car je ne connaissais pas grand-chose au sujet de l’analyse des anciens textiles, de la langue ou de la façon de déterminer l’authenticité de vieux ossements. J’ai débuté comme archéologue, alors je connais les techniques d’excavation, mais je ne savais rien au sujet de l’archéologie biblique, et le Dr Tabor a été une source d’information extraordinaire", explique Kathy Reichs.
Même si l’écriture d’À tombeau ouvert représente énormément de travail, l’anthropologue judiciaire affirme que c’est ce qui rend le défi passionnant. "J’apprends constamment en écrivant, même si je ne peux pas toujours utiliser mes nouvelles connaissances dans le cadre de mon travail d’anthropologue judiciaire. Par contre, il arrive que des policiers ayant lu mes livres m’écrivent pour me dire qu’ils sont parvenus à résoudre des dossiers en mettant en pratique certaines de mes théories. C’est très satisfaisant", assure l’écrivaine, occupée à mettre la dernière touche à son dixième roman. Après un détour par Charleston, où se déroule Break No Bones, son neuvième livre, Tempe sera de retour à Montréal et en Acadie, dans le cadre d’une intrigue qui l’oblige à revisiter son enfance.
À tombeau ouvert
de Kathy Reichs
Éd. Robert Laffont, 2006, 421 p.