Marie Hélène Poitras : Singulier pluriel
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Marie Hélène Poitras : Singulier pluriel

Marie Hélène Poitras, surgissant souvent où on l’attend le moins, nous ravit toujours. Même lorsqu’elle se glisse dans la peau d’un autre…

Si Marie Hélène Poitras s’implique avec passion sur plusieurs fronts – elle est entre autres journaliste musicale, littéraire et chef de section Musique à Voir -, c’est surtout dans l’écriture littéraire qu’elle trouve son souffle et se retrouve: "Quand j’écris, je ne suis pas dans une zone de confort, mais plutôt dans une zone de risque. Je me sens comme si j’étais au bord d’un précipice sans jamais y tomber. Je me sens ainsi plus vivante. Même si ce n’est vraiment pas une position confortable, ça reste la meilleure façon que j’ai trouvée de m’ancrer dans le monde, de m’enraciner, et j’en ai besoin."

Avec un premier roman, Soudain le Minotaure (Triptyque, 2003), un recueil de nouvelles, La Mort de Mignonne et autres histoires (Triptyque, 2005) ainsi que plusieurs participations à des revues, son parcours littéraire est parsemé d’honneurs: finaliste au Prix de l’Académie et au Prix des libraires, elle a remporté le Prix de la Bande à Moebius et le prix Anne-Hébert. À ajouter au mur des médailles, une distinction rarement accordée à de jeunes auteurs (elle est née à Ottawa en 1975): elle est cette année l’une des invités d’honneur du Salon du livre de Montréal.

Comme c’est l’habitude à l’approche d’un salon important, les éditeurs et les revuistes tentent d’y présenter quelques bons coups tout chauds: la revue Zinc sort donc son numéro 9, un numéro de gars… où Marie Hélène décide de nous surprendre encore sous la plume d’un certain Marroie. "Stéphane-Éli Marroie, c’était l’anagramme le plus crédible de Marie Hélène Poitras", précise l’auteure, qui parle plus librement maintenant que des amis écrivains – Patrick Brisebois et Stéphane Dompierre – ont découvert le subterfuge en se remémorant une vieille conversation où l’idée avait germé. "Je trouvais l’idée bonne parce que ça me donnait l’occasion de prouver concrètement ce que je n’arrête pas de dire. Avec un nom de gars, j’ai choisi d’écrire sur une thématique de gars mais sans jamais changer quoi que ce soit à mon style."

Aux côtés de McComber, Dompierre, Brisebois et Dupont, entre autres, elle publie 4 secondes par jour, une nouvelle autour de la pornographie. Il n’en fallait pas plus pour relancer un débat sur certains blogues, débat que l’auteure juge encore pertinent: "On n’a plus les mêmes points de vue, ni les mêmes réponses qu’il y a 20, 30 ou 40 ans." Pourtant, quelques années plus tôt, elle croyait avoir réglé, du moins en ce qui la concerne, la question du sexe de l’écriture en tenant, pour la moitié d’un livre (Soudain le Minotaure), un personnage de gars – un violeur en plus – qui était crédible et basé sur une foule de recherches.

L’anecdote démontre bien que si, de génération en génération, le questionnement évolue, on n’a toujours pas de réponses précises, et que certains continuent à alimenter le sujet. "Je côtoie ces auteurs (Dompierre, Brisebois et Cie), je les respecte, on a le même âge et nous sommes amis, mais je ne trouve pas qu’on participe au même type d’écriture." De quoi relancer le débat…

Revue Zinc
"Nouvelles voix masculines de la littérature québécoise"
Automne 2006, 128 p.

4 secondes par jour
4 secondes par jour
Marie Hélène Poitras
Revue Zinc