Réjean Bonenfant : Écrire
À 60 ans, Réjean Bonenfant a choisi de se consacrer davantage à l’écriture. Une année seulement après la publication de Mamerlor: Chroniques autour d’un Q-Tip (prix Gérald-Godin 2006), il signe donc son sixième roman, La Chute des limbes.
Réjean Bonenfant a longtemps partagé son temps entre l’animation culturelle et l’écriture. Un jour, la première activité a cependant commencé à faire de l’ombre à la seconde. "Je voyais venir mes 60 ans et je me suis dit: "Il faut que je recommence à écrire." Il y avait beaucoup d’écrivains qui me faisaient la morale, dont Clément Marchand." Même chose de la part d’une génération plus jeune d’auteurs, qui le pressaient de reprendre la plume. "À un moment donné, j’ai pris tout ça au sérieux. Je me suis dit que j’étais d’abord un écrivain dans la vie et j’ai fait Mamerlor. C’était comme un test. Si ce roman passait, celui-là [La Chute des limbes] passerait", explique l’auteur actuellement en résidence d’écriture à Montréal.
La veille de son 61e anniversaire, Bonenfant lance La Chute des limbes, roman qu’il avait d’abord publié sous forme de chroniques dans la revue Le Sabord à partir de 1991. Dans ce bouquin, qu’il a revisité huit fois avant de lui donner sa forme définitive, il s’est réapproprié les personnages de Mamerlor. Ainsi, s’il pige de temps à autre dans la fiction, il brode encore autour de sa propre existence. Il raconte sa vie comme marchand de bonbons à Norwich en Angleterre au XIXe siècle, sa mort et son séjour dans les limbes, d’où il chute pour vivre une seconde vie dans la campagne québécoise. "Je crois que j’ai épuisé la vie intime avec ce roman-là. J’ai dit tout ce qui était fondamental pour moi sur mes origines", avoue-t-il.
Au fait, pourquoi travaille-t-il toujours à partir d’un matériau personnel? "Ce n’est pas de devenir une oeuvre d’art, mais de faire en sorte que notre vie devienne une oeuvre d’art, répond-il. Moi, j’écris pour laisser des traces. Comme j’ai dit au lancement, je trouve ça très émouvant, 800 ans plus tard, de lire Tristan et Iseult. […] On n’est pas éternels, mais on peut, quelque part, devenir immortels, c’est-à-dire qu’il y a quelque chose de nous qui reste. […] Ça peut être en plantant un arbre, en mettant un enfant au monde, en faisant un livre ou de la musique. Mais il faut d’après moi laisser des traces."
La Chute des limbes
de Réjean Bonenfant
Éd. Le Sabord, 2006, 210 p.