Shift de nuit : L'afterhours du mot parlé
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Shift de nuit : L’afterhours du mot parlé

La populaire série Shift de nuit revient pour une troisième année dans le cadre du FVA. Après son absence l’an dernier, le père de ce concept nocturne original, Tony Tremblay, reprend la barre.

Son rôle, il le prend au sérieux, même si le but est bien sûr de s’amuser, de favoriser la spontanéité et les talents, tout en offrant une place de choix à la poésie, au spoken word et à la musique. "Je me suis beaucoup inspiré, se souvient Tony Tremblay, d’un personnage de la fin des années 60, Lenny Bruce, une espèce de gentleman déjanté qui était associé à la beat generation et à la scène spoken word de San Francisco, et de sa façon d’être sur scène. Un côté iconoclaste, frondeur, cynique, avec un humour percutant. C’est dans la partie micros ouverts que ce côté-là prend davantage le dessus."

UN HYMNE A LA SPONTANEITE

Le concept du Shift de nuit est né par un bel après-midi, lors d’une discussion entre Tony Tremblay et D.Kimm. L’idée en est très simple: tous les soirs du festival, de 23 h à 23 h 30 à la Casa del Popolo, trois poètes invités – deux francophones et un anglophone – livrent leurs textes aux festivaliers, accompagnés par des musiciens. Puis, les micros s’ouvrent aux plus courageux des membres du public, à condition que ces derniers veuillent bien se plier à l’austère "règle des trois minutes" de temps alloué, scrupuleusement appliquée par le coloré animateur.

"Le Shift de nuit, selon Tony Tremblay, c’est la seule série qui revient d’un soir à l’autre, donc c’est en quelque sorte la colonne vertébrale du festival, même si c’est en soirée. Il n’y a pas d’autres spectacles à cette heure-là, c’est donc LE point de ralliement pour les festivaliers et les artistes qui participent à l’événement." Dans cette atmosphère survoltée et improvisée, le défi pour l’animateur est de tenir la route dans le feu de l’action. "Bien des choses spontanées, que je ne peux absolument pas prévoir, vont se dérouler, qui vont probablement être très folles. Il y a la découverte d’une certaine liberté que j’espère pouvoir transmettre au public, pour qu’il se rende compte qu’en tout temps, tout est possible, toujours. Il suffit d’agir sur l’instant. Je pense que c’est ça, le Shift de nuit: agir sur l’instant, afin qu’il devienne ce que l’on veut qu’il soit."

Depuis cinq ans, le Festival Voix d’Amériques gagne en popularité, et tout porte à croire que cette sixième édition ira conquérir un public encore plus large. "Quand je pense au festival, je pense à l’intensité, à quelque chose d’extrêmement profond, et au public fidèle. Pour moi, c’est un événement qui aide à réconcilier les deux solitudes de manière admirable, parce que les artistes anglophones autant que de langue espagnole ou française s’y côtoient dans une ambiance de fraternité et aiment y revenir. Et ça, le public le sent."

AU PAYS DES ROCHES

Lorsqu’il n’est pas animateur au FVA, Tony Tremblay porte plusieurs habits. Il est poète, performeur, communicateur, cofondateur de la revue Exit et s’applique depuis plusieurs années à mettre de l’avant la pratique poétique et à la faire reconnaître comme un art important. Il a remporté le prix Émile-Nelligan en 1998, ainsi que le prix du Salon du livre du Saguenay-Lac-Saint-Jean en 1999 pour son recueil Rue Pétrole-Océan. Il oeuvre également à la radio depuis 21 ans et a cumulé les rôles de réalisateur, animateur, chroniqueur, journaliste, en plus de ceux de reporter à la télévision, producteur, webmestre et carnetier Web!

Son tout dernier recueil, Rock land, a d’ailleurs été écrit presque en entier sur son blogue (www.dieudiesel.com), son "carnet de création", avant d’être publié à l’Hexagone en mai dernier. Pour l’auteur, ce texte se veut un "voyage initiatique au pays de la roche". "Le pays de la roche, c’est comme si les entrailles du narrateur étaient en pics rocheux, c’est une entrée en soi-même pour s’affranchir de ce qui nous empêche d’avancer, ce qui nous fait peur, ce qui fait qu’on bloque." On s’y laisse dériver dans les eaux d’une langue vivante, qui parle loin et laisse place à l’imagination.

Rock land
de Tony Tremblay
Éd. de l’Hexagone
2006, 93 p.