Moonshine : Lune de fiel
Avec Moonshine, François Landry propose un roman haletant, à mi-chemin entre le roman policier et le thriller psychologique.
Dans la langue anglaise, le mot moonshine renvoie à deux réalités: la lumière de la lune et l’alcool fabriqué de façon illicite. Deux éléments que l’on retrouve dans le roman Moonshine de l’auteur François Landry.
Dans un bled perdu du Montana, David vit seul avec son horrible belle-mère à la suite du décès de son père. Né avec un pied bot qui le fait claudiquer, il subit avec peine les railleries et les abus de sa belle-mère; un diabolique personnage qui tient un lucratif commerce de moonshine. Après avoir subi plusieurs agressions, David décide d’en finir avec elle.
Dès les premières pages, le côté sadique de la belle-mère, Saras Higgins, frappe l’imaginaire. Elle abuse sans vergogne de son beau-fils et laisse libre cours à de bas instincts bestiaux. "J’imagine que c’est mon inconscient qui a fait ça", tente d’expliquer François Landry, qui avoue avoir craint de répugner le lecteur avec cette vieille sorcière. Mais l’empathie pour David et le rythme de l’action tiennent rapidement le lecteur en haleine.
Les sections du livre suivent le cycle de la lune, du "premier croissant" jusqu’à "l’éclipse" finale, qui nous laisse sur une fin mystérieuse. "C’est un roman qui joue sur la morale, observe l’auteur. C’est un peu manichéen. David représente cette zone d’ombre. Il n’appartient ni aux bons ni aux méchants." Plusieurs personnages secondaires se situent dans cette même zone: le compréhensif shérif Cohard, son tenace adjoint Enright et le Dr Kendall, alcoolique notoire et client de la vieille Higgins.
Professeur de littérature au cégep de Sherbrooke, François Landry a effectué de nombreuses recherches pour écrire ce quatrième roman. Notamment sur la sorcellerie, très présente dans l’intrigue, mais aussi sur l’agriculture, la famille de David pratiquant l’élevage de porcs et de moutons. L’art occupe également une place de choix dans l’histoire. C’est que le dessin et la peinture servent d’équilibre à David, qui en viendra même à atteindre une certaine renommée, poussé en cela par la belle Anna.
Auteur du roman Le Comédon, qui lui a valu le Grand Prix du livre de la Ville de Sherbrooke en 1994, François Landry songeait au départ à intituler son roman Le Pied bot. "Beaucoup ont été repoussés par le titre du Comédon, se rappelle-t-il avec humour. Je me suis dit: "Je ne ferai pas cette gaffe-là une autre fois."" Heureusement, alors qu’il discutait de son vil personnage avec une amie américaine, celle-ci s’est exclamée: "Ah! She’s making moonshine!" Le romancier venait de trouver un titre accrocheur à son ouvrage, dans lequel la lune occupait déjà une place importante.
François Landry avoue avoir vécu autant de plaisir que de souffrance en écrivant ce livre fascinant. Celui-ci comptait 525 pages avant que sa maison d’édition, La Courte Échelle, ne lui demande à deux reprises de le réduire en retirant plusieurs descriptions. "Je suis heureux qu’ils m’aient fait travailler un peu, observe l’auteur. Il y a des romans qui demandent plus de travail." En tout cas, pour le lecteur, Moonshine, c’est du bonbon.
Moonshine
de François Landry
Éd. La Courte Échelle, 2007, 308 p.