Stanley Péan : Les nocturnes de Stanley
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Stanley Péan : Les nocturnes de Stanley

Stanley Péan a tendance à mettre sur papier les pires travers de l’humanité. Son plus récent recueil de nouvelles, Autochtones de la nuit, ne fait pas exception.

Quand on lui fait remarquer que les 16 nouvelles rassemblées dans Autochtones de la nuit sont tout à fait déprimantes, Stanley Péan rigole: "C’est vrai que ce recueil est probablement mon plus sombre. Les gens sont souvent étonnés lorsqu’ils lisent mes histoires parce que dans la vie, je suis un bon vivant. C’est peut-être pour cette raison que j’aime autant m’amuser; pour exorciser le côté sombre et pessimiste présent en moi. Je voudrais avoir plus d’espoir en l’humanité, il y a d’ailleurs quelques petites percées de lumière dans le recueil (Les Nuits les plus noires et Le Samedi soir en sont de bons exemples), mais c’est difficile, car on est capable des pires cruautés. Quand j’observe l’état du monde, je me demande comment être à la fois lucide et optimiste", soutient l’écrivain, tout en soulignant l’évidence: "Quand on choisit d’écrire de la nouvelle et du roman noirs, difficile d’écrire des histoires hop la vie!" s’exclame-t-il.

Effectivement, et si Stanley réussit fort bien à faire émerger la noirceur qui sommeille en chacun de ses personnages, il le fait avec une dose d’ironie suffisamment grande pour relativiser les choses. Le meilleur exemple de cet humour noir sous-jacent, dans Autochtones de la nuit, est sans doute la nouvelle Le long et tortueux chemin qui mène à ta porte (traduction de la phrase centrale de la chanson The Long and Winding Road des Beatles), une référence à l’impérissable conte Le Petit Chaperon rouge, en plus d’être inspirée d’un fait vécu par l’écrivain lors d’un voyage en autobus il y a une quinzaine d’années. Dans la nouvelle de Stanley, la jeune fille qui s’en va chez sa grand-mère n’est pas seulement confrontée au grand méchant loup durant son périple dans les bois: ce dernier vit aussi avec sa grand-mère! Les lecteurs réaliseront par ailleurs que cette histoire fait suite à la première nouvelle du recueil, intitulée Mal à l’âme.

Comme toujours dans l’oeuvre de l’écrivain et musicien, qui anime depuis le début septembre les soirées jazz-chanson-littérature du mercredi au Café Sarajevo, on trouve dans chaque nouvelle d’innombrables références musicales. Le titre du recueil est d’ailleurs tiré de la chanson Black Trombone de Serge Gainsbourg: "J’ai toujours trouvé cette phrase remarquable. Comme si la nuit était un territoire et les autochtones, ceux qui y habitent. Ça fait une vingtaine d’années que je travaille la nouvelle Autochtones de la nuit", dit celui qui fête cette année ses 20 ans d’écriture. Quant au recueil Autochtones de la nuit, il complète la trilogie composée aussi de La nuit démasque (2000) et du Cabinet du Docteur K (2001). Maintenant que le travail de réécriture indispensable à la publication d’une collection de nouvelles est derrière lui, Stanley se dit prêt à entreprendre l’écriture d’un nouveau roman: "En fait, je travaille sur deux romans. L’un sur lequel je reviens périodiquement et dont je ne suis jamais satisfait et un autre, sur lequel je devrais travailler plus sérieusement en 2008. L’intrigue devrait tourner autour du motel, un lieu qui m’a toujours fasciné." Ça promet.

Autochtones de la nuit
de Stanley Péan
Éd. La courte échelle, 2007, 240 p.

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