Yann Perreau : Capteur de rêves
Yann Perreau publie Perreau et la plume, son premier recueil. Chansons, inédites ou non, poèmes et nouvelles. Un festin festif, brûlant et envoûtant, à l’image du chanteur.
L’écriture de Yann Perreau aime se faire mythologique. Elle s’élève, incandescente, vers des sphères que peu de chanteurs d’ici abordent. Le quotidien, très peu pour Perreau, sauf dans ses textes engagés, plutôt rares dans son livre. L’amour et la sensualité en sont les principales forces motrices. "C’est mon combat: essayer de semer un peu de lumière et de beauté. Je le fais humblement, mais avec tout mon être. Je suis un guerrier et ne veux pas arrêter. J’aime ce métier, car il permet de se battre sans faire mal aux autres ni à soi-même, même si parfois la création, c’est douloureux. Mais le plus souvent, c’est lumineux, dans l’urgence, dans l’amour."
Perreau et la plume, ça s’entend, ne s’est pas fait pour combler un dimanche d’ennui. Le chanteur a l’écriture dans le sang, une pulsion vitale. Ce bouquin compile une douzaine d’années de création, depuis les disques de son groupe Doc et les Chirurgiens: "Au départ, on m’a approché pour sortir un recueil de mes textes de chansons. Puis, cet été, j’ai fait la lecture de mes carnets de voyage pendant l’émission de Patrick Masbourian à Radio-Canada. Ce sont des récits d’aventures, issus de mes séjours en Californie et en Arizona. On a décidé de les inclure, ainsi que mes poèmes." Un livre hétérogène, donc, érogène, aussi, zone sensible.
En rapaillant ses écrits, l’auteur pensait à ses prédécesseurs, Charles Bukowski, Leonard Cohen, Jacques Prévert. "Pour choisir mes textes, j’ai glané dans mes journaux, dans mes carnets. J’ai pris ce que je considérais potable pour une publication. C’est clair que ça répond à un besoin différent. En chanson, on est limité, on doit faire un truc qui se tient entre trois et cinq minutes, même si j’essaie toujours de développer mon écriture. En forme de nouvelles, c’est plus éclaté. En poésie, selon moi, on peut aller plus loin sur le plan littéraire qu’en chanson. Je peux défoncer plus de trucs. Mais en même temps, la majorité de mes chansons était au départ des poèmes, sur lesquels j’ai mis des musiques…"
La section "nouvelles" du recueil est la plus courte, mais elle occupe la place centrale, essentielle pour bien apprécier le talent littéraire de Perreau. Ses carnets de voyage se lisent avec émerveillement: concis, envoûtants, poétiques, porteurs de rêves. Ils racontent, à peine romancé, le périple de Yann en solitaire sur les routes, noircissant ses pages au quotidien. "Tu traverses l’Amérique en Greyhound, alors Kerouac, tu le vis. Je jouais à être Yann Perreau, inspiré de Jim Morrison, Lucien Francoeur, de tous les auteurs que j’aime, ceux qui sont toujours à côté de moi quand j’écris. Je suis autodidacte. J’ai un mur de livres, un mur de disques."
Ainsi chemine Yann Perreau. Après deux albums avec Doc, deux autres en solo, un DVD de son spectacle Perreau et la lune à paraître en janvier, le temps du bilan était venu. Son premier livre est une malle à souvenirs. L’avenir l’attend, des mots en forme de fruits plein le cerveau. À goûter, comme il le chante.
Perreau et la plume
de Yann Perreau
Éd. VLB, 2007, 188 p.