John Ronald Reuel Tolkien : Le premier Tolkien
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John Ronald Reuel Tolkien : Le premier Tolkien

Exhumé des notes de John Ronald Reuel Tolkien par son fils Christopher, Les Enfants de Húrin donne à la multitude d’admirateurs de l’auteur du Seigneur des Anneaux, décédé en 1973, l’occasion de découvrir un inédit.

Pour reconstituer la trame des Enfants de Húrin, Tolkien fils a passé au peigne fin des milliers de pages de manuscrits légués par son père. Il en a extrait la somme des passages faisant référence à Túrin, fils de Húrin, héros au sort tragique déjà connu des lecteurs du Silmarillion.

Christopher Tolkien décrit admirablement bien, en préface, le travail titanesque dont il a dû s’acquitter pour faire d’un collage minutieux "une oeuvre indépendante, à part entière", sans aucun ajout de sa part. Les Enfants de Húrin est donc un "vrai" Tolkien, un roman complet reconstitué à partir des écrits authentiques de l’auteur.

Dans ce roman de jeunesse, le philologue d’Oxford a déjà construit l’univers de la Terre du Milieu dans ses moindres détails. Un monde plus dur encore que celui du Seigneur des Anneaux où l’orgueil mène trop souvent les hommes à leur perte. Un monde, enfin, qui a ses propres logiques et qui ne peut qu’impressionner le lecteur par sa cohérence et sa complexité.

L’action se situe aux premiers âges de la Terre du Milieu, 6500 ans avant Le Seigneur des Anneaux. Les hommes livrent un combat sans espoir contre le ténébreux Morgoth et ses armées d’orques et de dragons. Le guerrier Húrin est fait prisonnier par les forces du mal après la déroute de l’armée des hommes. Celui-ci refuse de livrer à Morgoth le secret du lieu de la citadelle des Elfes, puissants ennemis du sombre seigneur. Furieux devant l’inflexibilité de son prisonnier, Morgoth jette alors sa malédiction sur la descendance de Húrin: "Vois! L’ombre de ma pensée pèsera sur eux partout où ils iront, et ma haine les poursuivra jusqu’aux confins du monde." Suivront alors les funestes aventures de Túrin, fils de Húrin, héros complexe, guerrier valeureux mais maudit, et de sa soeur, la courageuse Niënor. Ils affronteront tous deux les épreuves de leur implacable destin avec toute l’ardeur du désespoir.

L’ombre de la Première Guerre mondiale plane sur cette légende, écrite en partie en 1916, alors que Tolkien était soldat dans les tranchées de la Somme. Le choc des armes, les sacrifices des soldats lors de "la bataille des larmes innombrables" "où fut fauchée la fleur des Eldar", et dont "une vie d’homme ne suffirait pas pour en conter toutes les péripéties", évoquent avec force les souffrances dont Tolkien a été témoin. Et c’est là, sans doute, que réside l’un des principaux attraits de ce récit. Au-delà du caractère épique du texte, c’est surtout par ce qu’il laisse entrevoir, dans les passages les plus émouvants du texte, la sensibilité de son auteur, qu’il tient le lecteur sous son emprise.

Les Enfants de Húrin
de J.R.R. Tolkien
Trad. de l’anglais par Delphine Martin, ill. par Alan Lee
Éd. Christian Bourgois, 2008, 302 p.

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Le Seigneur des anneaux du même auteur; Beowulf, La chanson des Nibelungen

Les Enfants de Húrin
Les Enfants de Húrin
J.R.R. Tolkien
Christian Bourgois