Jean-Nicolas Vallée : Seule au monde
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Jean-Nicolas Vallée : Seule au monde

Le premier roman graphique de Jean-Nicolas Vallée suit la pensée d’une jeune fille suicidaire, mais il s’agit d’un récit lumineux qui ne tombe jamais dans le pathos.

La couverture de Par un fil ne laisse présager que le meilleur de la bande dessinée contemporaine. Le coup de crayon (ou plutôt de pinceau) du Sherbrookois Jean-Nicolas Vallée possède toute la finesse de celui de l’Américain Craig Thompson ou du duo français Dupuy et Berberian. Lorsqu’on plonge dans cette histoire, que l’auteur qualifie d’"autofiction", notre enthousiasme se confirme. Ce bédéiste maîtrise parfaitement les codes du neuvième art et mérite sa place aux côtés de ceux qui travaillent à l’épanouissement de la BD québécoise (Michel Rabagliati, Jimmy Beaulieu…).

Jean-Nicolas Vallée n’est pas né de la dernière pluie côté bande dessinée. De 1988 à 2001, il était du magazine Safarir. "Ce fut mon école. Je préparais mon dessin. J’avais déjà un style pas pire", se remémore-t-il. Après un court passage à la revue Kamikaz, il fit ensuite de l’illustration pour des livres pédagogiques et jeunesse. Depuis quelques années, il oeuvre en tant que réalisateur pour la télévision.

Grand lecteur des romans graphiques de L’Association (une maison d’édition française), il s’est senti interpellé par la nouvelle vague de bédéistes. "Je voulais faire de quoi moi aussi, mais j’étais tanné du gag. Je ne veux pas me comparer à Woody Allen, mais entre Bananas et Annie Hall, il y a un gros changement de ton. Je voulais que ce soit tout aussi radical. J’ai donc commencé l’écriture d’un scénario en 2004 à partir d’éléments autobiographiques." Ainsi, certaines réflexions du personnage d’Ariane, une jeune fille en peine d’amour qui a des pensées suicidaires, sont inspirées d’un journal que l’auteur écrivait il y a de cela 15 ans.

"Au départ, ça se terminait par un suicide. Elle ne s’en sortait pas, la fille. En retravaillant l’histoire, j’ai vu que ça n’avait pas de bon sens. J’ai donc travaillé sept fins différentes et j’ai choisi. Là, ça me ressemble plus. Je ne suis pas quelqu’un de noir ou de tragique. Ça prenait donc un peu d’humour et de poésie." Dans le récit, le salut d’Ariane est incarné par le personnage de Luis, un adepte de voyages astraux et de Goethe.

Jean-Nicolas Vallée remporte son pari. Il a su aborder la question du suicide, mais de façon émouvante, sans tragédie.

Par un fil
de Jean-Nicolas Vallée
Mécanique générale, 2008, 64 p.

À lire si vous aimez /
Blankets de Craig Thompson, Dupuy & Berberian, les Paul de Michel Rabagliati

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Jean-Nicolas Vallée
Les 400 coups