Maxime Chattam : Sexe, sang et fange
Le Stephen King français est de retour avec La Promesse des ténèbres, un roman haletant, une descente aux enfers, où il expose et dissèque les plus bas instincts des hommes.
New York, hiver 2000. Giuliani est à la mairie. Bush arrive au pouvoir. L’Amérique a des envies de pureté. Elle veut se faire récurer aux grandes eaux javellisantes du puritanisme républicain.
Le couple O’Donnel, constitué d’Annabel, détective de la NYPD, et de Brady, journaliste indépendant, bat de l’aile, souffre de la lente érosion de leur passion. Il faut que Brady se change les idées. Il a besoin d’un exutoire, de se perdre dans son travail, d’un nouveau reportage qui briserait sa routine. Pierre, ami français, dandy fêtard et homo qui fréquente le tout Manhattan, le lance sur la piste de Rubis, rencontrée lors d’un party huppé. La jeune femme joue dans des films pornos underground réputés pour leur violence. Lors de l’unique rencontre entre Brady et celle-ci, elle sort un Smith & Wesson avec lequel elle se fait exploser le visage.
Traumatisé, le journaliste décide de mener l’enquête, de comprendre ce qui a bien pu pousser une femme, gracieuse, intelligente, à mettre fin à ses jours de manière si brutale, devant un parfait inconnu. Pourquoi l’avoir pris, lui, comme témoin de son suicide?
Alors que sa femme, Annabel, hérite du dossier au commissariat, Brady va, à son insu, se plonger dans le monde interlope de la pornographie hard, un monde qui s’ouvre sur d’autres, plus glauques encore. Le périple de Brady a tout du voyage initiatique, orphéen ou dantesque, vers les égouts de l’esprit, l’enfer de la ville.
Chattam fait de son New York une transcription littérale de l’univers de la cosmologie médiévale, un monde en strates, une échelle au haut de laquelle brillent des paradis, mais qui mène aussi à la noirceur moite et grouillante des souterrains et des galeries où se terrent les damnés que la société veut oublier.
Pourtant, à chaque niveau de cet univers vertical, la vie obéit aux mêmes règles. Pour tous, elle se constitue "d’un fluide impalpable, une essence d’innocence, d’instincts, un bouquet d’envies alimenté par des racines de curiosité." Mais un bouquet qui se fane trop vite, un fluide qui peut tourner au poison.
Chattam est un maître du feuilleton. S’il était né au XIXe siècle, il aurait été de la famille de Michel Zevaco ou de Luigi Natoli. Produit de son époque, son écriture est cinématique, ou encore, télévisuelle. On lui pardonne les lourdeurs, les répétitions, les métaphores faciles, parce qu’on le lit avec le même plaisir coupable que l’on ressent à l’écoute d’un bon vieil épisode de CSI, bien dégoulinant de scènes gore. Son imagination malsaine fascine. Il a la plume gluante, adhésive. Il nous scotche.
La Promesse des ténèbres de Maxime Chattam, Éd. Albin Michel, 2009, 425 p.
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