Kathy Reichs : Tomber sur un os
Kathy Reichs nous parle de son onzième roman, Les Os du diable, qui voit Temperance Brennan fréquenter l’univers mystérieux des religions alternatives.
Elle passe désormais plus de temps à sa table d’écriture que dans les labos d’analyse judiciaire, mais elle garde un pied dans le métier. Kathy Reichs, auteure de best-sellers mondiaux et productrice, depuis 2005, d’une série télé tirée de son oeuvre – Bones -, est parfaitement consciente que sa très pointue profession est un fameux réservoir d’histoires à succès. Nous avons rencontré l’anthropologue judiciaire alors qu’elle était de passage à Montréal, où elle travaille encore, bien qu’à l’occasion, pour le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale du Québec.
Dans Les Os du diable, onzième enquête de son alter ego Temperance Brennan, Kathy Reichs explore le monde des religions marginales et des cultes secrets. Un domaine qu’elle n’avait pas encore abordé de front dans ses livres, mais qui l’interpelle depuis des années. "Dans mon métier, nous sommes régulièrement témoins de pratiques étonnantes impliquant des ossements, des gestes rituels. Et puis, j’ai eu l’occasion d’entendre des spécialistes traiter de ces sujets, entre autres de la religion santería, sorte de croisement de pratiques religieuses venues d’Afrique et d’usages catholiques. Tout ça a mûri peu à peu, et j’y ai finalement vu une piste intéressante pour un roman."
Devant les restes de ce qui a toutes les apparences de cérémonies rituelles, Temperance va évidemment devoir faire usage de talent. Établir l’identité d’une victime, par exemple, à partir de son crâne, auquel manque de surcroît la mâchoire (une partie qui en dit long sur quelqu’un, vous étiez au courant?). Comme toujours, ces passages plus techniques font le régal du lecteur, qui a l’impression de regarder par-dessus l’épaule de la spécialiste. "Comme je connais à fond ce métier, que je connais son jargon, souligne la romancière, je donne beaucoup d’information au lecteur. Je sais que je dois prendre garde à ne pas donner trop de détails, toutefois, ça pourrait alourdir l’histoire. De toute façon mon éditeur me surveille! Tout ce qui est montré doit servir le récit."
JE EST UNE AUTRE
On a déjà beaucoup écrit sur le rapport qu’entretient Kathy Reichs avec Temperance, qui est certes une création mais dont les traits de caractère sont essentiellement les siens. Douze ans après la genèse, on peut se demander si ce rapport a évolué, si l’auteure l’aborde autrement. "Tout le monde change, et elle aussi, répond la principale intéressée. Temperance a traversé, au fil de ces années, plusieurs histoires d’amour, des hauts et des bas professionnels, des chocs émotifs… Donc, elle a évolué, comme n’importe qui sur une douzaine d’années, mais mon rapport avec ce personnage est toujours le même: je la connais jusqu’au bout des ongles, et inversement."
Y aura-t-il une vie littéraire après Temperance Brennan? Kathy Reichs ouvre de grands yeux: "Mais bien sûr! Selon mon contrat, je dois encore écrire cinq livres de cette série. Après, je pourrais très bien aller complètement ailleurs", soutient celle qui a déjà un projet parallèle du côté de la littérature pour jeunes adultes. "Temperance a davantage besoin de moi que je n’ai besoin d’elle!"
Les Os du diable
de Kathy Reichs
Éd. Robert Laffont, 2009, 368 p.
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LES OS DU DIABLE
Y a-t-il un lien entre la découverte d’ossements animaux et humains dans une cave dissimulée et celle, sur les rives d’un lac, d’un corps décapité? Avec les outils qui sont les siens, ceux de l’anthropologie judiciaire, et de concert avec toute une cohorte d’enquêteurs, dont elle va méticuleusement nous détailler les défauts physiques – déformation professionnelle? -, Temperance Brennan cherche à faire la lumière sur ce qui pourrait être des rites sataniques. Cette fois encore, le style est plutôt générique et les personnages parfois caricaturaux, mais l’intrigue béton et les recherches labos de l’héroïne, forcément crédibles, titillent notre curiosité jusqu’à la dernière page.