Marc Kelly Smith au Grand Slam 2011 : Devine qui vient slamer?
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Marc Kelly Smith au Grand Slam 2011 : Devine qui vient slamer?

Pour une cinquième année consécutive, le Festival international de la littérature accueille le Grand Slam de la Ligue québécoise de slam. À cette occasion, le poète américain Marc Smith, père fondateur du mouvement, fait escale à Montréal.

"Au tout début du mouvement, j’avais senti que le slam se répandrait à travers les États-Unis, mais je n’imaginais pas qu’il traverserait l’océan", avoue Marc Kelly Smith, joint par téléphone à quelques jours de son retour chez nous. Surnommé Slam Papi, l’écrivain et performeur sexagénaire a certes de quoi s’enorgueillir du succès remporté par la forme de poésie-performance qu’il a lancée à Chicago dans les années 80, succès dont il ne s’étonne pas. "Les humains sont pareils partout, vous savez, et si un phénomène triomphe quelque part, il est à peu près sûr qu’on peut reproduire ce triomphe n’importe où ailleurs."

En réaction contre les récitals de poésie soporifiques auxquels il avait assisté ou participé, le poète qui se définit volontiers comme un socialiste s’est inspiré de ses souvenirs des soirées folk de sa jeunesse. "Elles sont là, mes racines, chez Woody Guthrie, Pete Seeger et tous ces artistes qui venaient dans les YMCA, les écoles, les centres communautaires pour chanter et aborder les problèmes sociaux. Dans mon quartier, ce sont ces artistes qui ont ouvert nos horizons plus qu’ils ne l’avaient jamais été."

Aujourd’hui constamment invité à des événements aux quatre coins du monde, le fondateur du mouvement constate que son bébé présente les mêmes forces et faiblesses un peu partout. "Le côté positif, c’est que le slam finit par créer une communauté de gens issus de divers milieux. Le slam a redonné à un tas de gens un lieu qui leur manquait, parfois à leur insu, un lieu où ils se sont reconnus." Et si cet aspect "démocratique" fait parfois verser le slam dans l’amateurisme, Smith ne s’en formalise pas trop. Pour lui, l’idée première était d’instaurer un événement littéraire public qui pourrait attirer tout le monde. "Mon ambition était plus sociale que politique. Dès les premières années, j’ai voulu que le slam maintienne une ouverture totale à toutes les influences, des poètes cowboys du Texas aux rappeurs new-yorkais. Le slam n’exclut personne."

MOUVEMENT COLLECTIF

Quand on l’interroge sur la distinction qu’il établit entre le slam et la poésie dite littéraire, destinée essentiellement à la publication, Slam Papi répond sans coup férir. "Deux choses fondamentales: d’abord, l’idée de performance, du mariage entre l’écriture littéraire et l’art oratoire; ensuite, l’obligation de savoir captiver l’auditoire, d’interagir avec lui. Si on attend d’un acteur de théâtre ou de cinéma qu’il puisse toucher le spectateur, pourquoi en serait-il autrement dans le cas de celui qui monte sur une scène pour dire sa poésie?"

On a beaucoup insisté et parfois même critiqué le slam pour le rapport de rivalité qu’il instaure entre les poètes participant aux manifestations publiques, ce qui fait rire Marc Smith. "Cette histoire de la compétition arbitrée et évaluée par des juges, on l’a développée un peu par dérision, avec un grain de sel. Mais cette formule a été reprise, sans doute parce que c’était la plus facile à reproduire. Et à cause de l’insistance des journalistes sur cet aspect du slam, une partie de l’auditoire et même certains slameurs se sont mis à prendre cette compétition au sérieux. Ce qui a surtout prouvé leur manque total d’humour."

Slam Papi ne cache pas sa fierté d’avoir célébré récemment un quart de siècle de poésie-performance. "Au fil des ans, j’ai appris que l’art est une chose sacrée, destinée à changer la vie des gens qui y sont exposés. À la commémoration de nos 25 ans d’existence, j’étais ému de voir des représentants de plusieurs générations qui avaient été touchés par le mouvement."

Celui qui prononcera une conférence sur le slam au Lion d’or, le 19 septembre, reste intarissable sur le poète Carl Sandburg, l’un de ses mentors. "Sandburg était comme moi socialiste; il écrivait sur la vie de tous les jours et a connu un certain succès populaire et financier durant sa carrière, ce pourquoi l’institution littéraire américaine a toujours déprécié son oeuvre et l’a réduit au statut de simple activiste politique et continue de le bouder. Mais sa poésie aborde un spectre impressionnant de la condition humaine, elle touche l’universel et c’est pourquoi je me reconnais en lui. Sans compter le fait qu’il était aussi de Chicago!"

Le Grand Slam 2011, animé par Ivy et présenté en collaboration avec le FIL, opposera des slameurs issus de Montréal, Québec, Trois-Rivières, Gatineau et Rimouski.

Les 18 et 19 septembre
Au Lion d’or
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