Nelly Arcan : Burqa de chair
On a moins parlé, ces derniers jours, du livre posthume de Nelly Arcan que de l’attaque en règle contre Guy A. Lepage et Tout le monde en parle que plusieurs ont vue dans l’un des textes qu’il comporte, La honte. L’occasion est belle de rappeler que l’auteure, disparue il y a deux ans déjà, n’avait jamais calqué la réalité, surtout pas la réalité des émotions. Que des blessures vraies aient été à la source de ses textes, que des personnages bien réels aient fourni la matière première à ses figures romanesques et autres «hommes debout», ça ne fait aucun doute, mais il faut d’abord voir dans son oeuvre une fiction, ou à tout le moins une vérité isolée du réel puis scrutée à la loupe. Donc grossie. Même quand la narratrice a mille choses en commun avec Nelly Arcan, comme dans La robe, premier des trois inédits ici rassemblés – texte réussi, autour d’une femme incapable de quitter une robe de chambre «fanée». Un livre composite, inégal mais pertinent, qui nous mène bel et bien à la rencontre de l’écrivaine et dont la préface, signée par Nancy Huston, montre qu’il peut y avoir des malentendus quant à son personnage public, mais certainement pas quant à la puissance de son verbe. Éd. du Seuil, 2011, 168 p.