Karoline Georges : Sous béton
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Karoline Georges : Sous béton

Simple observation: Karoline Georges aime les majuscules. "La Matière Noire", "l’Explosion Originelle", "le Béton Total", écrit-elle. Détail, vous dites? Bien sûr, mais détail révélateur d’une entreprise littéraire aussi affectée qu’étrange. Ovni littéraire, dira-t-on et on entendra, pour une rare fois, le mot ovni au sens propre, car c’est avec une incrédulité fascinée – la même que si on avait entrevu une soucoupe dans le ciel – que l’on émerge de Sous béton. Irrépressible envie d’appeler les amis pour tout leur raconter. Mais pour leur dire quoi, au juste? Voyons voir. De retour après un long silence, l’artiste multidisciplinaire, remarquée en 2004 grâce à Ataraxie (L’Effet pourpre), échafaude une dystopie au style clinique, un roman d’apprentissage ésotérique sur la liberté de pensée et les portes de la conscience. Tentons de résumer: claquemuré dans une cellule exiguë de "l’Édifice", "l’enfant", soumis aux foudres d’un père aliéné et aux inconstances d’une mère craintive, "avale ses nutriments" sans faire d’histoires jusqu’à ce qu’une question fasse irruption: "Pourquoi?" Une interrogation séditieuse, dans les circonstances, qui lui permettra, à terme, d’accéder à une certaine forme d’omniscience. À la différence du roman d’anticipation traditionnel, souvent prompt à fustiger par en dessous l’économie de marché (par exemple), Georges ne délivre pas sur un plateau d’argent les clés requises pour déverrouiller ses métaphores. Reste un récit radical, d’une singulière froideur, que l’on gagnera à aborder comme de la prose poétique. Éd. Alto, 2011, 192 p.

Sous béton
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Karoline Georges
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