Emmanuel Simard : Poésinéma
Avec L’oeuvre des glaciers, la première parution sur papier d’Emmanuel Simard, la poésie se fait son cinéma.
À l’origine, l’auteur Emmanuel Simard projetait de se consacrer au septième art. Et puis, par la force des choses, l’écriture aura pris une place prédominante dans son affirmation artistique. "Ça a sorti de moi comme ça, de s’étonner Simard. Ce n’était pas calculé. Au départ, je voulais faire des films. Mais, à un moment donné, tu te ramasses qu’en sortant de l’école, tu n’en fais pas de films. Tu écris tout seul et tu envoies ça à quelques maisons d’édition et là, on te répond que c’est de la poésie que tu fais."
L’an passé, Emmanuel Simard faisait paraître aux éditions Le chat qui louche une nouvelle intitulée La chute du jour, et ce, en format numérique. Et voilà que Simard fait maintenant le grand saut sur papier grâce à L’oeuvre des glaciers. Véritable mine d’or en imagerie combinant violence et passion, le recueil de poésie reflète fidèlement l’imaginaire de l’auteur. "Je suis un gars qui écrit assez lentement. Et mes textes viennent en grande partie d’expériences personnelles. Pour le reste, ça découle d’une espèce de désabusement. Disons qu’il y a eu un moment où ça n’allait vraiment pas bien dans ma vie. D’ailleurs, le narrateur de mon recueil recherche quelque chose de sacré. Il se demande s’il y a une place pour ça et dans sa tête, la seule affaire qui reste sacrée, c’est le meurtre. Donc il se met à en commettre en plus de produire des actes qui s’y apparentent."
Malgré un détour par la littérature, Emmanuel ne s’en cache pas: le cinéma occupe toujours une place prépondérante dans son art. Un projet d’adaptation de sa nouvelle Le chant des cabanes est en cours et, même lorsqu’il met le costume de poète, on ne peut s’empêcher de remarquer une grande influence cinématographique dans son oeuvre. "Mes racines en création proviennent du cinéma. J’aime cette forme d’art et j’espère qu’elle demeurera toujours partie prenante de ma poésie. Cette inspiration-là me permet aussi de me distinguer des autres poètes. Qu’on le veuille ou non, si je suis venu à la poésie, ou plutôt si la poésie m’a choisi, c’est à travers le septième art. C’est par l’entremise d’Andreï Tarkovski ou des frères Dardenne que j’ai compris qu’on pouvait sortir des sentiers narratifs traditionnels."
Enfin, bien que Simard exclue toute possibilité de se lancer dans de grandes épopées ayant la consistance d’une brique, la poésie semble s’être bien logée dans son univers créatif. "Probablement qu’il est trop tôt pour avancer quoi que ce soit, mais il y a un petit germe en moi qui travaille. En fait, je continue un peu sur l’idée du sacré. Nietzche parlait de volonté de puissance, un état de liberté de coeur et d’esprit, et je me demande si c’est possible de l’atteindre encore aujourd’hui. Je note des mots que j’aime et à un moment donné, il y a une fusion entre ceux-ci, et une image se produit. Ça coïncide bien avec mon cerveau. Je suis vraiment fragmentaire dans ma tête. On a toujours des idées de grandeur, comme d’écrire des romans, mais je ne crois pas être fait pour produire de grandes fresques historiques de 800 pages."
L’oeuvre des glaciers
d’Emmanuel Simard
Éditions Poètes de brousse, 2012, 72 p.