Triptyque du territoire : Vu au Festival du texte court de Sherbrooke
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Triptyque du territoire : Vu au Festival du texte court de Sherbrooke

Le vent venait de tous les côtés, jeudi dernier au Boquébière lors de la soirée Triptyque du territoire qu’avait assemblée la grande timonière du nécessaire Festival du texte court, Sophie Jeukens. À ma gauche, un ventilateur format hélice d’avion tournait à toute allure et menaçait de renverser ma pinte à chaque instant. Devant moi, trois poètes de Québec s’échinaient bellement à prouver que la capitale n’a pas encore été totalement gangrénée par la pensée poubelle et l’abjecte vénération du sacro-saint marché. Pour des pelleteux de nuages, ils brassaient beaucoup d’air, les poètes, même Jeff Fillion l’aurait reconnu.

Le cabotin Renaud Pilote a d’abord mis la table en vadrouillant, carnet à la main, entre basse et haute ville. Ses Renauderies (du nom de son récent recueil) traquent la poésie là où on n’aurait pas le réflexe d’aller la chercher, dans une cabine téléphonique par exemple. Invitez-le au Grand Rire!

La performance d’Hélène Matte tenait du show de diapositives sur l’acide. En racontant un séjour révélateur en République démocratique du Congo, la globe-trotter, soutenue par des projections, faisait contre mauvaise fortune bon coeur et rappelait qu’"on s’habitue à tout", constat aussi désolant qu’encourageant.

C’est cependant la Nord-Côtoise d’origine Érika Soucy qui souffla le plus fort sur la petite foule transie. Lu à vitesse grand V, son recueil L’épiphanie dans le front (Éd. Trois-Pistoles), récit d’une enfance à attendre dans le frette le père parti travailler au nord du Nord, me riva à mon siège comme un tour de montagnes russes. Soucy vomit comme elle étreint un certain Québec sur lequel avaient triomphé la misère et la violence, du moins jusqu’à ce qu’elle ne prenne la parole.