En contemplant les sommets des hautes chaînes de montagnes et en écoutant les exploits des adeptes contemporains de l’alpinisme, on oublie souvent que bien avant la création des vêtements et des équipements hautement sophistiqués, des sportifs d’une autre époque sont passés par là, ouvrant littéralement la voie à ceux qui allaient suivre. C’est le cas d’Albert Frederick Mummery, qui fut le premier à atteindre le sommet de l’aiguille du Grépon, en 1881, exploit qui est ici magistralement rapporté par Nicolas Debon au fil de planches d’une beauté émouvante où le vide vole carrément la vedette. On y suit le célèbre alpiniste en compagnie de ses deux guides, Venetz et Burgener, affrontant la montagne avec une simplicité fascinante. Attachez-vous bien, il s’agit d’un album mémorable.

Rien n’est de trop dans ce récit graphique qui nous offre un assemblage de dialogues spontanés et d’images d’une poésie à couper le souffle. On y croit à toutes les cases sur lesquelles on prend plaisir à s’arrêter longuement pour savourer le vertige et la rudesse de la pierre. C’est d’ailleurs avec un certain regret qu’on termine la dernière page, car on s’attache à une étrange nostalgie en suivant ces pionniers d’un autre siècle. Par chance, l’auteur nous offre en fin de parcours un article permettant de mieux connaître les divers personnages et une bibliographie qui donne envie d’aller à leur rencontre par d’autres chemins. Aucun doute, il s’agit d’un travail de maître d’une rare beauté et d’une pertinence documentaire indiscutable. Du solide. éd. Dargaud, collection Long courrier, 80 p.