Tim Burton : Tim aux mains d’argent
Le cinéaste Tim Burton se livre en toute confiance dans Entretiens avec Mark Salisbury.
De son propre aveu, le cinéaste Tim Burton n’est pas quelqu’un qui communique facilement ses idées, ses émotions, avouant même ne s’exprimer qu’à demi-phrase, incapable de mettre des mots sur les folles idées germant dans son esprit créatif. Ce trait de caractère, qu’il partage avec Johnny Depp, son acteur fétiche et alter ego à l’écran, n’a cependant pas empêché le journaliste britannique Mark Salisbury de créer avec lui, au fil des années, un lien de confiance tel que le gamin solitaire de Burbank, banlieue californienne, puisse livrer de façon ordonnée ses passions cinéphiliques, ses débuts chez Disney et ses souvenirs de plateau, du court métrage d’animation Vincent jusqu’au tournage de son ambitieuse comédie musicale Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street.
«C’est un pur génie, et, croyez-moi, j’utilise ce mot avec parcimonie. Il est impossible d’étiqueter ce qu’il fait. Ce n’est pas de la magie, car ça impliquerait qu’il y a un truc. Ce n’est pas uniquement de la dextérité, car ça donnerait l’impression que c’est de l’acquis. Ce qu’il possède en lui, c’est un don peu commun», affirme avec enthousiasme Depp dans la préface, qui laisse croire que les entretiens de Salisbury seront également teintés d’admiration.
Admiratif, le journaliste l’est certes puisqu’il s’agit du troisième livre qu’il consacre à Burton. Étonnamment, l’intervieweur garde la tête froide face à son interlocuteur et guide patiemment le lecteur dans les dédales de l’univers gothique et fantaisiste du père d’Edward aux mains d’argent. D’un film à l’autre, on se surprend à découvrir la logique et la constance qui animent l’esprit du cinéaste.
«Tous les films que j’ai faits ont des faiblesses. Mais je m’accommode mieux des faiblesses de mes autres films que de celles de Batman. Je suis le père de tous mes films et ils sont tous mes enfants. Certains ont subi des mutations, d’autres ont d’étranges problèmes, mais je les aime tous», admet Burton lorsque Salisbury revient sur les échecs et les critiques négatives qui ont ponctué sa carrière. Si l’on regrette par endroits que Burton ne creuse pas davantage les pistes analytiques que l’auteur lui propose, le résultat, ponctué d’exquis dessins de Burton, s’avère un sympathique portrait d’artiste où la vision artistique prend le pas sur la vie privée.
Tim Burton: entretiens avec Mark Salisbury
de Mark Salisbury
Éd. Points (Seuil), 2012, 400 p.